.
Le précédent Maire de Paris s’était couvert de ridicule dans cette histoire. Dans quelle tisane nauséabonde va se retrouver son successeur. Cet enthousiasme de commande n’a-t-il pas un relent de caniveau? Comment peut-on être aussi aveugle , imprévoyant et délibérément suicidaire ?
« Le peuple n’a pas de pain ? Qu’il mange de la brioche », aurait dit la reine Marie-Antoinette en 1789. Même si la citation est plus que douteuse elle annonçait à sa manière le fossé mental entre les hautes sphères, leur vision du monde , leur conception égoïste du Bien et les aspirations d’un peuple qui , à force d’être méconnu, allait se jeter dans l’insurrection renversant l’Ancien Régime et la monarchie absolue.
Pour Emmanuel Macron, si les ouvriers sont licenciés, ils devraient rechercher du travail ailleurs au lieu de foutre le bordel — sic ! De nombreuses municipalités n’ont plus les moyens d’entretenir un stade et d’assurer le fonctionnement ou la surveillance d’ une piscine . Quatre mille clubs de foot-ball ont déjà disparu ces dix dernières années .
Macron et sa cour nous offrent, à la place, le droit d’applaudir aux exploits de quelques sportifs de substitution , médaillés ou méprisés selon leurs résultats, (devant la télé, entre d’interminables pubs pour vanter les mérites des sponsors. Avec Pop corn et Bière.
Ceux qui verraient encore dans le sport un école de formation humaine sont priés de ranger leurs illusions aux vestiaires .
Il ne leur reste que l’indignation à opposer à l’indécence de tous ces larbins qui se félicitent de ces impostures en cascades.
L’INDÉCENTE MASCARADE DE LIMA
Le 11 septembre dernier, ils partirent à trois cents pour une délégation française, pourtant limitée
en principe à soixante places par le CIO (1) à Lima (Pérou), avec un Boeing Air France spécialement affrété.
Sur quel financement ?
Hébergés dans le meilleur hôtel 5 étoiles de la ville, ils ont festoyé dans un des restaurants les plus réputés d’Amérique latine. où il v avait bien plus que de la brioche !
Une facture d’au moins 1,5 million d’euros pour quatre jours à la charge du GIP « Paris 2024 » (groupement d’intérêt public), la bagatelle de 5 000 euros par tête de pipe. Il y avait, pêle-mêle et main dans 1a main, l’équipe dirigeante du CNOSI (2) Valerie Pécresse (LR présidente de la région °ile de France , Anne Hidalgo (PS, maire de Paris), Stephane Troussel (PS, président du conseil départemental de Seine Saint Denis ), des élus de Paris et de la Seine Saint Denis, des athlètes triés sur le volet, avec des soutiens unanimes allant d’En marche au PCF… pour fêter la désignation de Paris pour les JO de 2024.
Et tout cela pour rien du tout : tout le monde savait que Paris avait été choisi depuis plus de trois mois pour les JO de 2024 après l’accord avec la ville de Los Angeles et surtout des sponsors américains de prendre ceux de 2028 en échange de substantielles compensations financières.
Une mascarade pour un secret de Polichinelle afin que leur fête commence, la grande foire du cirque financier !… (3)
10,7 MILLIARDS POUR… 24 MÉDAILLES
Les gouffres financiers des précédents JO d’Athènes, de Londres et de Rio (sans parler de Sotchi pour les JO d’hiver en Russie) ont soulevé de tels scandales que cette fois, juré, craché, la facture globale ne dépassera pas 6,2 milliards.
Londres s’était engagée sur… 3 milliards d’euros pour une facture qui, au final, s’est montée à 13 milliards ! Le CIO s’est engagé pour 3 milliards, tout le reste relevant du comité « Paris 2024 ». Ce sont là toutes les infrastructures sportives et extra-sportives comprenant
le village olympique,
le centre aquatique (à Saint-Denis),
les aménagements nécessaires (transports notamment…).
Les retombées économiques sont évaluées par le CDES à 12,7 milliards. (4)
Bien évidemment, personne ne croit à ces estimations inscrites pour valoriser le dossier parisien. Selon Alexandre Delaigue, professeur d’économie à Lille-I, rien que l’exigence de tenir les délais (nouvelles lignes de métro du Grand Paris notamment) engendrera d’importants surcoûts.
Et ceci intervient au moment où Macron engage une succession d’agressions contre toutes les collectivités locales, au point que les présidents de régions viennent de claquer la porte des « négociations ».
Premières visées, bien sûr, les 36 000 communes de France, déjà largement asphyxiées par des suppressions et réductions drastiques des subventions de l’État ; Or ces communes ont de nombreuses obligations financières légales , incontournables, et se retrouvent dans la majorité des cas sans autres possibilités que d’alourdir leur budget et rogner sur les financements prévus depuis longtemps en matière de culture et de sport.
.
En fait la politique nationale décidée par Macron et ses soutiens de la Mairie de Paris est là pour faire tourner la mécanique à sponsors et appauvrir les communes interdites de fait d’équipements sportifs
Des risques considérables d’endettement sont déjà pris, que ni le CIO ni les sponsors ne paieront.(5) L’État et « Paris 2024 » quant à eux ne percevront même pas les recettes de la vente des billets ni les droits de télévision
Pour vingt-quatre médailles, modeste objectif fixé par la ministre des Sports de Macron, Laura Flessel (magnifique championne d’escrime s’il en fut), cela va faire cher la médaille !
MAIS LES JEUX OLYMPIQUES DES SPONSORS ET DES BANQUES doivent impérativement avoir lieu
Pour payer (sans oublier les notes de frais des organisateurs), il va falloir attirer
les sponsors,
les publicitaires,
les équipementiers,
les grandes marques,
les grands du BTP,
les sociétés du CAC 40
et évidemment les banques, tout le gratin de la finance.
Ces gens là n’ont rien à voir avec les amoureux du sport ou des philanthropes ; ils pratiquent un autre sport : la conquête des marchés et la spéculation financière. Dès 2014, le gouvernement Hollande avait ( tout à son enthousiasme) déjà exonéré d’impôts et de taxes les entreprises partenaires des JO qui bénéficieront également d’espaces publicitaires réservés et exclusifs sur tous les lieux des épreuves.
Macron avait chaleureusement approuvé. La vaste foire commerciale et financière va aboutir à un manque à gagner de plusieurs centaines de millions d’euros pour l’État, c’est-à-dire pour les contribuables.
Tout le monde sait combien le peuple Grec est condamné de ne pas avoir remboursé les dettes des JO d’Athènes.Je ne sache pas que des sponsors auraient été ruinés à l’occasion de ces jeux là , ni des suivants d’ailleurs Et, pendant ce temps-là, la réforme des collectivités territoriales, déjà évoquée, définit les activités sportives comme une compétence non obligatoire et partagée.
Très innocemment Le président du CNOSF lui-même, en 2016, s’inquiétait de la baisse de 8 % des crédits d’État affectés aux fédérations sportives. Des milliers de clubs amateurs (14 000 rien que pour le foot-ball) sont étranglés financièrement
de plus en plus serrés avec des licences déjà trop chères,
des subventions publiques de plus en plus réduites,
des stades, des gymnases et des piscines en nombre insuffisant et souvent dans un étai pitoyable .(6)
UNE PISCINE OLYMPIQUE DANS LE 93 UN CACHE-MISÈRE DE LUXE
Le département Seine-Saint-Denis, avec une moyenne d’âge la plus basse de France, manque cruellement d’installations sportives. 0,55 bassin pour 10 000 habitants alors que la moyenne nationale est de près de 1 pour 10 000. Les gouvernements successifs le savaient très bien, alertés à plusieurs reprises par les élus locaux et départementaux. Enfin une superbe piscine olympique de 50 mètres va être construite à Saint-Denis.
Merci Macron !
Braves gens, sachez donc que dans ce département populaire, populaire, près de 60 % des enfants qui rentrent en sixième ne savent pas nager (recensement officiel). Et pour cause, des heures de ‘piscine dues aux élèves des écoles ne sont pas assurées, faute de cars pour y emmener les élèves et faute de bassins d’évolution suffisamment grands pour les accueillir tous. Il n’y a que 36 piscines publiques pour 1,5 million d’habitants dont seulement deux avec bassin de 50 mètres. La piscine d’Aulnay-sous-Bois (83 300 habitants) est fermée depuis 2014, sa réhabilitation ou sa reconstruction revenant entre 10 et 20 millions d’euros. 17 piscines sont vétustes et exigent une réhabilitation. Celles de Saint-Ouen, Livry-Gar-gan, Le Blanc-Mesnil, Rosny sont fermées pour travaux.
Le conseil départemental a certes prévu un plan de 40 millions pour cinq ans, mais ils ne permettront même pas de construire les 5 piscines nouvelles envisagées.
L’institut régional pour le développement du sport (IRDS) préconise de doubler le parc actuel et de rénover 80 % du patrimoine du 93. Ce serait un coût minimum de 800 millions.
C’est beaucoup, mais c’est moins de 1 % des réductions budgétaires que le gouvernement Hollande (11 milliards) et maintenant Macron (13 milliards)
ont programmé de réaliser aux dépens des collectivités territoriales pour,
entre autre financer les investisseurs privés qui achètent les JO.
Ce qui est bon pour les JO ne le serait-il pour les enfants de la Seine-Saint-Denis, de nos villes , villages et départements ?
Macron et sa cour nous répondront-ils que si les jeunes n’ont pas de piscine digne de ce nom, ils n’ont qu’à s’en construire une dans leurs villas ?
Les acteurs du mouvement sportif sont en état de légitime défense. Avec l’appui du mouvement ouvrier et démocratique, ne sont -i1s pas en droit d’exiger des pouvoirs publics que les fonds publics, ceux de leurs fédérations, tous les droits de télévision et de toutes les publicités soient réservés pour assurer, pour tous, la pratique libre et gratuite du sport dé leur choix ? •
-
CIO : Comité international olympique ; président : Thomas Bach ; représentant la France : Guy Drut.
-
CNOSF : Comité national olympique et sportif fran-çais; président : Denis Masseglia. Sponsors: Lacoste, P et G, Adecco, FDJ, Allianz, Adidas, Acer, BMW, Coca-Cola, Mac Donald, Somfy, BPCE, Visa…
-
Dans le journal municipal de Sevran, on apprend qu’une conseillère municipale, ayant quitté le PS pour se recycler chez Macron, faisait partie de la délégation à Lima. Elle approuve, toute honte bue, la destruction du plus grand des deux stades municipaux de sa ville de 50 000 habitants (les terrains, les vestiaires et la halle des sports sont vendus à la métropole du Grand Paris ; on ne sait pas pour combien).
-
CDES : Centre de droit et d’économie du sport.
-
La ville de Paris consacre 46 millions d’euros pour la pratique du sport. La seule candidature de la ville a déjà coûté plus du double, précise le maire du 2e arrondisse-ment de Paris, Jacques Boutault (EELV), qui dénonce cette politique ne créant rien pour le sport pour tous. Il s’étonne que la ville trouverait d’un seul coup des millions pour dépolluer la Seine pour pouvoir y organiser des épreuves de natation aux JO après avoir laissé le fleuve souillé pen-dant tant d’années.
-
Le nombre de contrats aidés dans le sport était de 459 000 en 2016. Macron veut le faire passer à 200 000 en 2018. Une saignée de plus pour le sport amateur, qui s’ajoute aux autres difficultés qu’il rencontre pour sur-vivre, essentiellement grâce à ses bénévoles.
nous sommes à un tournant, le CIO, après avoir snobé les candidatures solides française (pas assez « in ») pour les joies de l’exotisme et des mallettes ne veut pas se retrouver le bec dans l’eau.
seules les villes des « vielles » démocraties avec une excellente économie sont capables d’assumer l’événement; il ne s’agirait pas de les filer trop vite au qataris ou à un pays en voie de développement sous prétexte que…
Pékin, La Grèce, la Russie et le Brésil ont refroidi plus d’un pour différentes raisons. Plus personne ne se porte volontaire vu les exigences de ces oligarques qui ne voient pas la fin de l’olympisme venir face aux sports extrêmes et aux spectacles de masse.
certes ça fait moins « open », ça sent le rance mais tant pis, heureusement que le France est là pour les accueillir en plus ils sont près à faire des concessions ces gogos. Au final les olympiades verront ou auront vu Londres, Rio, Tokyo, Paris, Los Angeles soit 4 villes « traditionnelles et historiques » sur 5.
les aventures exotiques ne sont sans doute que parti remise.
Mais le CIO devrait remercier Paris d’avoir accepté ce boulet.
Bonjour Furtif,
La question que je me pose après avoir lu cette analyse bien fouillée et découvert la pénurie d’installations nautiques en Seine saint Denis, concerne le sport à l’école. Après la réforme des « rythmes scolaires » contraignant un certain nombre de municipalités à ne pas renouveler le contrat des professeurs certifiés de sport du fait du coût des activités organisées sur les plages libérées d’enseignement, il serait temps de décompter les classes privées de sport dans le primaire. Sous couvert d’ouverture culturelle en direction des familles les plus modestes, n’aurait-on pas marginalisé le sport qui offrait aussi des activités comme la danse etc..?