Je viens de vivre une expérience épatante, presque 24H00 non-stop à Jérusalem avec ses habitants ; juifs, chrétiens, musulmans, sans religion, si y’en a pas beaucoup mais y’en a ; citoyens, colons, résidents, réfugiés ou pèlerins. Une foule bigarrée et cosmopolite. Il y avait là toutes sortes de gens, boulangers pâtissiers, architectes, étudiants, musicos, chômeurs beaucoup), des inactifs (beaucoup) dont on se demande de quoi ils peuvent bien vivre, des doux-dingues, des rêveurs, des policiers, des militaires, des hommes politiques.
Ah non, tiens ! Justement pas le moindre politique en vue, ni local ni national ni international. Pas plus que d’experts en géopolitique auto-proclamés. Pas de grands Y’aka ni de petits Faut’cons. La vraie vie quoi avec des vrais gens de tous les jours. Pas de présentateur-vedette non plus, genre Pujadas ou Roselmack en direct live des studios à Paris et qui se posent là, entourés de sa cour de spécialistes de la question, pour nous dire à nous, ignares et incultes que nous sommes, ce qu’il faut regarder, ce qu’il faut écouter, ce que nous devons comprendre.
Pas de séquences : de temps en temps, quand la bouche se fait sèche, mais le moins souvent possible et pas pour trop longtemps surtout, faut pas déconner quand même, et pour illustrer son propos, notre grand journaliste d’investigation consent à prêter son antenne à notre envoyé spécial sur le terrain. Faut comprendre quoi, les ruptures de faisceaux et toussa menacent. Alors voici notre grand reporter qui prend la parole pour une brève présentation qui n’en finit plus de la situation sur le terrain. Fier descendant d’Albert Londres mais en tenue adéquate et la barbe qui va bien avec, tel un Lucien Bodard partageant la case des frères Vilas Boa en plein Mato Grosso, le voilà donc qui ose, sur injonction de l’oreillette, une sortie de l’hôtel Intercontinental, direction la rue. L’étendard de la bravoure déployé aux vents mauvais et malgré les dangers que nous devinons tous, il va tenter de questionner un passant qui passe, au hasard.
Les gamins sont là qui font déjà des pitreries devant la caméra. Enfin, il en tient un de passant au hasard. S’en suit deux monologues de quelques mots en globish et une traduction-interprétation inversement proportionnelle à la longueur du dialogue. « voilà David ce qu’on peut dire à l’heure actuelle sur le terrain où la situation se dégrade rapidement, à vous Paris. » En effet, les gamins hilares, rejoints par des ados pas moins exubérants, ont commencé à entreprendre notre intrépide tinetine, pourvu que l’oreillette ne lui demande pas d’improviser pour meubler pendant que David pisse un coup.
Mais de quoi qu’il nous cause là, le Xavier, présentateur ? Reporter ? C’est quoi tout ce fratras ? Ah mais c’est vrai ! Emporté que j’étais par l’enthousiasme que m’ont provoqué ces 24H00 à Jérusalem, j’ai omis de vous préciser que, en fait, je n’étais pas tout à fait à Jérusalem, enfin physiquement je veux dire, mais devant ma télé. Enfin quand je dis télé, je dois préciser ARTE-TV. C’est pas tout à fait pareil, vous conviendrez.
Ce samedi donc, ARTE-TV nous invitait à un voyage spatio-temporel sous forme d’un documentaire unique d’une durée de 24H00 synchrone avec notre journée, de 06H00 samedi matin à 06H00 dimanche matin. Pas de coupure pub, pas d’annonce de sponsor, rien. Juste un journal d’actualités concis d’un quart d’heure de 19H45 à 20H00 samedi, sinon, rien de rien je vous dis, le doc et uniquement le doc en continu.
Samedi à 06H00 je suis debout mais je ne sais pas pourquoi mon logiciel interne me signale qu’on est dimanche. Bin merde j’ai loupé le doc d’arte ! Zut alors, j’ai oublié de le regarder hier. Bon après tout ce n’est pas bien grave ce n’était que de la TV, allez café-clope, mise à jour auto du logiciel interne et là … Mais c’est qu’on est samedi, 06H15 ! C’est bon, allez route fissa vers le canapé, télécommande à poste ? OK, c’est parti ! Et ma voilà d’emblée embarqué avec deux éboueurs, un israëlien et un palestinien, en plein milieu de leur tournée une fois dans un quartier juif une autre fois musulman. Pas de problèmes, les deux hommes s’entendent bien, même très bien et le boulot leur convient, ils peuvent entretenir leur famille correctement. Puis viennent les files d’attente aux check-points, le mur, une sage-femme et ses collègues dans la clinique où elle va finir son tour de garde de nuit, on va la suivre chez elle. Entretemps, on rejoint un étudiant dans un abribus, il va être en retard à son cours mais comme dans toutes les facs du monde ça n’a pas l’air de le déranger plus que ça. On découvre ainsi plusieurs personnages qu’on va suivre sur ces 24H00. Ceux qui finissent la nuit de travail et qui rentrent dormir et ceux qui finissent leur nuit de sommeil et qui partent travailler. On se prend à fredonner le refrain de la chanson de Lanzmann/Dutronc : « Il est 05H00, Paris s’éveille … ».
A 11H00, c’est la grosse douche, il pleut à seau sur Jérusalem à faire pâlir d’envie le premier basque venu, je n’en peux plus. Trop d’informations à ingurgiter en même temps, je n’arrive plus à suivre, je sature. A grands regrets, je décide qu’une halte s’impose, mes derniers scrupules s’envolent quand la patronne annonce que la tortore est prête : « à la soupe là-dedans, bordel ! ». 13H00, une bonne sieste s’impose. 15H00, café-clope. Bon alors, j’y retourne, ou pas ? OK, allons-y ! et c’est reparti. Je ne vois pas le temps passer, captivé que je suis. 19H45, le journal passe, je suis accompagné par une solide assiette charcutière et un bon fromage qui pue, un grand coup de Côte du Rhone là-dessus et me voilà paré pour la suite, Jérusalem me voilà ! A 01H00, toujours assidu et passionné, je décide quand même temps de quitter. Demain, je reçois de la famille et je ne veux pas avoir une tronche de dératé.
Alors que dire de cette expérience passionnante ? D’abord que ça me fait le même effet qu’un livre qu’on a dévoré et qu’on a besoin de relire à tête reposée. Je vais donc l’enregistrer sur ARTE +7 et ensuite le regarder à nouveau tranquillement en intégralité par tranches de 06H00 sur 4 jours en essayant de respecter les tranches horaires, je pense. Il peut aussi se regarder heure par heure. Ensuite, dans les grandes lignes et en vrac, je vous livre quelques points que j’ai retenu :
- La façon de filmer et le montage, à l’inverse de la façon de faire généralement adoptée aujourd’hui, aussi bien au cinéma que dans les documentaires, où un plan de plus de 5 secondes est considéré comme rédhibitoire. Par moments, la musique d’accompagnement est un peu, comment dire ? Agaçante ? Oui c’est ça, mais si peu et si peu souvent qu’on oublie.
- Les commentaires, courts et en voix off, sont toujours dits sur un ton neutre et n’ont qu’un caractère informatif et permettent de suivre le fil plus facilement. Qui est ce personnage, sa religion, son quartier d’habitation, où il se trouve, ce qu’il va faire, qui sont ces personnes dans son entourage, si besoin seulement, etc…
- La grande différence dans les relations entre personnes au sein de la famille et surtout hommes/femmes, adultes/enfants. Les relations juifs/muslims qui n’ont pas l’air si dégradées qu’on veut bien nous le laisser croire ……mais les provocations des deux bords existent.
- L’utilisation du mot dieu à chaque instant dans la conversation, un peu comme dans le sud-ouest de la France où le terme « congg » sert à ponctuer la phrase avec son équivalent d’enkuulé dans le sud-est. L’omni-présence de la religion fatigue et énerve un peu à la longue. Quel carcan ! La montée des religieux est observée chez les palestiniens, le rôle des pétro-monarchie est mentionné dans ce fait
- La bouffe est omniprésente et malgré les interdits ou les prescriptions des religions, ça n’a pas l’air dégueulasse, beaucoup de légumes, peu de viande on dirait.
- Malgré la peur et le stress, latents, et dus au terrorisme islamiste et même si tout le monde fait comme si, la vie grouille. Il y a de la vie partout, à toute heure, toutes classes sociales confondues, les gens déambulent dans les rues même la nuit. Je suis sûr qu’il y a plus de mouvements ici, dehors à 23H00, qu’à Paris à la même heure, de même que les ruelles n’ont pas l’air d’être des coupe-gorges même si la racaille existe en petit nombre, ce sont les mêmes que chez nous. Les rappeurs dealers bling-blings aussi, comme chez nous, ce sont à peu près les mêmes mais en moins virulents dans la posture et les mots.
- Mais il y aurait tant à dire. Au fur et à mesure que la journée se déroule, on se prend de sympathie pour tous ces gens et on se dit qu’on taillerait bien le bout de gras avec eux devant un bon demi de bière à la terrasse d’un café à la nuit tombante.
- En dernière conclusion je laisse la parole à un jeune israëlien qui a perdu sa sœur en 2002 lors d’un attentat islamiste dans un bar : « Les palestiniens se disent toujours les victimes mais pourtant il y a eu plus de six millions de juifs victimes de la Shoah et depuis 1945 on n’a jamais vu un jeune juif mettre une ceinture d’explosifs pour aller se faire sauter dans un bar en Allemagne »
Faites vous votre avis : A voir ou revoir sur ARTE +7 « 24h Jerusalem »
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La patronne annonce vraiment la soupe de cette manière-là, Xavier ? 😆 😆 😆
Sinon, j’ai un problème de fond avec les spectacles qui durent une éternité. Je me souviens déjà du « Méphisto » d’Ariane Mnouchkine, quelque chose comme 5 heures de spectacle, ou « Le soulier de satin » de Claudel, même genre de durée. C’est insupportable, limite une impolitesse : prétendre « prendre » 5 heures de la vie d’un spectateur qui n’est pas un pur esprit, qui doit de temps en temps dormir, manger, travailler…
Là, bien que retraité mais quand m^me très occupé, je sais que je n’aurai jamais le temps de voir ce truc-là.
Question piège : à quoi peut-on savoir que la carte de l’article n’émane pas d’institution ou organisme sioniste ?
Bin j’ai choisi cette carte un peu au hasard…
ouais mais à quoi voit-on que ce n’est pas une carte sioniste ?
J’invite les milliers de lecteurs du Site Maisdisons-Hebdo à venir répondre à Léon (1)
___ (1) Qui rigole dans son coin .
Bientôt un quartier pastafarien à Jérusalem?
Découverte exceptionnelle sous le mont du Temple. Une équipe d’archéologues a découvert lors des fouilles d’une salle des Écuries de Salomon un mobilier funéraire pastafarien: une passoire en or ainsi qu’un évangile pastafarien authentique du Temple du Monstre en Spaghetti Planant datant du Bronze ancien. La passoire est abîmée mais les inscriptions て ン のつに つい ての リン ク « Gloire à sa Sainteté notre Nouille Céleste » sont pratiquement intactes.
Suivi des découvertes archéologiques en cours et des évènements dans le monde de l’archéologie
Le Pastafarisme est reconnaissable à son art religieux
Baptisé par ses détracteurs le style « Nouille » il accumule les arabesques que les Islamiens n’ont aucun motif de revendiquer.
Je n’ai toujours pas la réponse à ma question. Z’êtes pas très doués…
Bon là fatiguée mais je réponds avant d’aller dodo hips!
Cette carte est hébrophobe… il ne peut pas y avoir de « projet de colonisation »
les Israéliens ne construisent pas chez quelqu’un d’autre mais sur leur terre. Non mais!
y a un peu de ça. Je vous donne la réponse : un sioniste ne parle jamais de « Cisjordanie » mais utilise les appellations bibliques « Judée-Samarie ».
Chez Wikipédia, il y a pas mal de trucs et de bidules qui ne collent pas. Souvent il n’y a pas de référence et certaines notes ne correspondent à rien de ce qui est affirmé, surtout en ce qui concerne les « religions ».
Par exemple, sur cette page
À l’arrivée des musulmans, en 638, dans la ville de Jérusalem, les ruines du Temple sont utilisées comme dépotoir par les chrétiens (11) dans un souci d’humiliation des juifs et afin de concrétiser la prophétie selon laquelle pas une pierre ne resterait en cet endroit.
Bin la note 11 ne parle pas de ça.
Ailleurs on peut lire
Jusqu’à récemment, on pensait que dans la période byzantine le Mont du Temple avait été délibérément abandonnée par les chrétiens et transformée en dépotoir locale [10] afin de remplir la prédiction du Nouveau Testament que le temple serait totalement détruite…[11] Ces points de vue ont été remis en cause par la publication récente des résultats archéologiques. Les fouilles, les seules jamais admises au Mont du Temple par le Waqf musulman dans les temps modernes, ont été menées par des archéologues britanniques dans les années 1930. Sous la mosquée al-Aqsa, ils ont trouvé des preuves d’un sol en mosaïque, datant du Ve à VIIe siècles, tout à fait similaire à ceux trouvés dans des églises à Bethléem. Très probablement, ce sont des vestiges d’une église byzantine (ou d’un monastère?) qui a été construite sur le Mont du Temple. [12]
Et là
Le Dôme du Rocher a été construit en 691 – 692…
L’esplanade fait 280 mètres sur 490 correspond à peu près à l’esplanade du Temple de Salomon, détruit en 70 par Titus. Après que Hélène, la mère de l’empereur Constantin, a découvert la Vraie Croix à Jérusalem en 326 ap. JC, les Chrétiens ont délaissé cette esplanade pour se concentrer sur la partie occidentale de la ville. Ils ont notamment laissé les ruines des temples romains (et notamment d’un temple consacré à Jupiter) sur cette terrasse, une façon de montrer symboliquement la victoire du christianisme sur les religions païennes. Aux ruines de l’esplanade s’opposent les nouvelles églises qui se multiplient à Jérusalem. Au moment où les musulmans prennent la ville, c’est donc un espace vide de culte, mais chargé de mémoire et de symboles.
D’où vient cette histoire de dépotoir?
La fabuleuse escapade de Hélène à Jérusalem qui en revient chargée de trouvailles toutes plus précieuses les unes que les autres en dit beaucoup sur l’authenticité et la hauteur de l’exigence morale de la foi chrétienne dans les couches qui allaient décider de son avenir.
Hélène c’était une sacrée bricoleuse. A 75 ans, après avoir abattu un vieux temple de Vénus, avec croix et des clous elle te construit un saint escalier de 28 marches de marbre blanc.
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Jérusalem, une ville mythique si chargée d’histoire
Dès la première moitié du IIe millénaire, cette petite ville « cananéenne » est mentionnée dans les textes égyptiens d’exécration. Un peu plus tard, au XIVe siècle, les tablettes akkadiennes d’El-Amarna (Haute Égypte) comportent plusieurs lettres de son « maire », Abdi-Hepa, au pharaon, y évoquant ses démêlés avec les maires des villes voisines. À cette époque la pression des ‘Apiru, groupes de hors-la-loi, se fait sentir en Cisjordanie centrale et, même si les habitants de Jérusalem se sentent en sécurité derrière leurs murailles, la ville semble plutôt en sommeil.
Canaan à l’ombre des pharaons (XVIe-Xe siècles av. J.-C.)
André Lemaire
Directeur d’études à l’Ecole pratique des hautes études