Le monde arabe hait les femmes (Mona Eltahawy)

César a trouvé sur Slate ce texte qui l’a bouleversé...
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Dans Distant View of a Minaret, feu Alifa Rifaat, auteure égyptienne trop peu connue, commence sa nouvelle par l’histoire d’une femme si indifférente aux relations sexuelles avec son mari qu’elle observe une toile d’araignée au plafond à balayer plus tard pendant qu’il se concentre uniquement sur son plaisir à lui. Elle a le temps de ruminer sur ses refus répétés de prolonger le rapport jusqu’à ce qu’elle aussi atteigne l’orgasme, «comme s’il voulait la priver exprès». Au moment même où son mari refuse de la faire jouir, l’appel à la prière interrompt son orgasme à lui, et il sort. Après s’être lavée, elle se perd en prière—tellement plus épanouissante qu’elle a hâte qu’arrive l’heure de la prochaine— et se met au balcon pour regarder dans la rue. Elle interrompt sa rêverie pour préparer consciencieusement le café de son mari, qu’il boira après sa sieste. Elle l’apporte dans la chambre afin de le verser devant lui, comme il aime, et constate qu’il est mort. Elle envoie leur fils chercher un médecin.
«Elle retourna au salon et versa le café pour elle. Son propre calme l’étonnait.»

En juste trois pages et demie, Rifaat déroule un tiercé de sexe, de mort et de religion, un bulldozer qui écrase le déni et toute velléité défensive pour viser au cœur de la misogynie dans le monde arabe. Il n’y a pas à dorer la pilule. Ils ne nous haïssent pas à cause de nos libertés, comme le voudrait le cliché américain usé post-11-Septembre. Nous n’avons pas de libertés parce qu’ils nous haïssent, comme le dit si puissamment cette femme arabe.

Oui: ils nous haïssent. Il faut que cela soit dit.

Certains me demanderont peut-être pourquoi j’aborde le sujet maintenant, au moment où la région se soulève, nourrie pour une fois non par la haine habituelle de l’Amérique et d’Israël mais par une exigence commune de liberté. Après tout, est-ce que tout le monde ne devrait pas d’abord obtenir les droits de base, avant que les femmes n’exigent des traitements particuliers? Et qu’est-ce que le genre, ou le sexe d’ailleurs, a à voir avec le Printemps arabe?

Notre révolution n’a pas commencé

Mais je ne parle pas du sexe caché dans des coins sombres ou dans des chambres fermées. Un système politique et économique dans son intégralité —qui traite la moitié de l’humanité comme des animaux— doit être détruit en même temps que les tyrannies plus ostensibles qui étouffent l’avenir de la région. Tant que la colère ne se sera pas déplacée des oppresseurs de nos palais présidentiels aux oppresseurs dans nos rues et nos maisons, notre révolution n’aura pas commencé.
Alors: c’est vrai, les femmes du monde entier ont des problèmes; c’est vrai, les États-Unis n’ont pas encore élu une femme président; et oui, les femmes continuent d’être traitées en objet dans beaucoup de pays «occidentaux» (je vis dans l’un d’entre eux). C’est généralement là-dessus que la conversation se termine quand vous essayez de discuter des raisons pour lesquelles les sociétés arabes haïssent les femmes.
Mais mettons de côté ce que les États-Unis font ou ne font pas aux femmes. Citez-moi un nom de pays arabe, et je vous réciterai une litanie de mauvais traitements, attisés par un mélange toxique de culture et de religion, que peu semblent vouloir ou pouvoir démêler de peur de blasphémer ou de choquer.

Imaginez… C’est 1.000 fois pire

Quand plus de 90% des femmes mariées en Egypte —y compris ma mère et cinq de ses six sœurs— ont subi une mutilation génitale au nom de la décence, alors sûrement, il est nécessaire que tous, nous blasphémions. Quand les femmes égyptiennes sont soumises à d’humiliants «tests de virginité» uniquement parce qu’elle ont osé prendre la parole, il n’est pas temps de se taire. Quand un article du code pénal dit que si une femme a été battue par son mari «avec de bonnes intentions» aucuns dommages-intérêts exemplaires ne peuvent être demandés, alors au diable le politiquement correct. Et dites-moi, s’il vous plaît, ce que sont de «bonnes intentions»? Légalement, elles sont censées comprendre toute raclée qui ne soit «pas violente» ou «dirigée vers le visage».
Ce que tout cela signifie, c’est que quand on en vient au statut de la femme dans le monde arabe, la situation n’est pas meilleure que ce que vous pensiez. En fait elle est mille fois pire. Même après ces «révolutions», on considère que tout va à peu près pour le mieux dans le meilleur des mondes tant que les femmes restent voilées, prisonnières de leur foyer, qu’on leur refuse la simple mobilité de monter dans leurs propres voitures, qu’elles sont obligées de demander aux hommes la permission de voyager et qu’elles sont incapables de se marier, ou de divorcer, sans la bénédiction d’un mâle responsable d’elles.
Aucun pays arabe ne figure parmi les 100 premiers du Rapport mondial sur l’inégalité entre les sexes du Forum économique mondial, ce qui place toute la région dans son ensemble parmi les bons derniers de la planète. Pauvres ou riches, nous détestons tous nos femmes.

Eternelles mineures

L’Arabie saoudite et le Yémen voisins, par exemple, sont peut-être à des années-lumière l’un de l’autre en termes de PIB, mais quatre places seulement les séparent dans l’indice des inégalités, avec le royaume à la 131e position et le Yémen 135e sur 135. Le Maroc, dont la loi «progressiste» sur la famille est si souvent vantée (un rapport de 2005 par des «experts» occidentaux le qualifie «d’exemple pour les pays musulmans visant à l’intégration dans la société moderne») occupe la 129e place; selon le ministère de la Justice marocain, 41.098 filles de moins de 18 ans y ont été mariées en 2010.
On comprend facilement pourquoi le Yémen est le pays le plus mal noté, puisque 55% des femmes y sont illettrées, 79% ne travaillent pas et une seule femme siège au Parlement qui comprend 301 députés. Les abominables reportages sur des fillettes de 12 ans qui meurent en couches n’aident pas à y endiguer la vague des mariages d’enfants. A la place, les manifestations de soutien au mariage des enfants surpassent celles qui s’y opposent, alimentées par les déclarations du clergé claironnant que les opposants à la pédophilie approuvée par l’État sont des apostats car le prophète Mahomet, selon eux, aurait épousé sa deuxième femme Aïcha alors qu’elle n’était qu’une enfant.
Mais au moins les femmes yéménites ont-elles le droit de conduire. Cela n’a certainement pas mis un terme à leurs innombrables problèmes, mais c’est un symbole de liberté —et un tel symbolisme ne résonne nulle part ailleurs plus fort qu’en Arabie saoudite, où le mariage des enfants est également pratiqué et où les femmes sont d’éternelles mineures quel que soit leur âge ou leur niveau d’études. Les femmes saoudiennes, beaucoup plus nombreuses que les hommes sur les campus des universités, en sont pourtant réduites à regarder des hommes bien moins qualifiés qu’elles contrôler tous les aspects de leur vie.

Oui, l’Arabie saoudite, où la rescapée d’un viol collectif a été condamnée à de la prison pour avoir accepté de monter dans une voiture sans membre masculin de sa famille, et qui a dû recourir à la grâce royale; l’Arabie saoudite, où une femme qui bravé l’interdiction de conduire a été condamnée à 10 coups de fouets et a elle aussi dû implorer la grâce royale; l’Arabie saoudite, où les femmes n’ont toujours pas le droit ni de voter, ni de se présenter aux élections, et où un décret royal promettant de leur accorder le droit de vote pour des élections locales presque totalement symboliques en —vous allez rire— 2015 est considéré comme un «progrès».

Pourquoi nous haïssent-ils?

La situation est tellement déplorable pour les femmes en Arabie saoudite que ces minuscules cadeaux paternalistes sont accueillis avec ravissement et que le monarque qui les octroie, le roi Abdallah, est salué comme un «réformateur» —même par ceux qui devraient avoir un peu plus de jugeote, comme Newsweek, qui en 2010 l’a fait figurer parmi les 11 dirigeants mondiaux les plus respectés.
Vous voulez savoir à quel point la situation y est navrante? La réaction du «réformateur» aux révolutions qui ont surgi dans toute la région a été d’engourdir son peuple à coups de davantage de subsides gouvernementaux —notamment à destination des fanatiques salafistes de qui la famille royale saoudienne tient sa légitimité. Le roi Abdallah a 87 ans. Attendez de voir le prochain sur la liste, le prince Nayef, un homme tout droit sorti du Moyen-Age. Sa misogynie et son fanatisme donnent au roi Abdallah des airs de Susan B. Anthony.

– En grande partie pour une histoire de sexe, ou plus précisément d’hymen.

«La raison pour laquelle les extrémistes s’acharnent toujours sur les femmes reste un mystère pour moi», a récemment regretté la secrétaire d’État américaine Hillary Clinton. «Mais ils semblent tous le faire. Peu importe le pays où ils vivent ou la religion qu’ils revendiquent. Ils veulent contrôler les femmes.» (Et pourtant Clinton représente une administration qui soutient ouvertement beaucoup de ces despotes misogynes.)

Si ces régimes exercent un tel contrôle, c’est souvent par conviction que dans le cas contraire, une femme n’est jamais qu’à quelques degrés de la nymphomanie. Voyez Youssef al-Qaradawi, le religieux populaire et animateur de télévision sur Al Jazeera, conservateur de longue date, qui a développé un penchant étonnant pour les révolutions du monde arabe —une fois qu’elles avaient commencé, bien entendu— car il avait compris sans doute que celles-ci allaient éliminer les tyrans qui avaient tourmenté et opprimé à la fois lui et le mouvement des Frères musulmans dont il est issu.

L’Insatiable Tentatrice

Je pourrais vous trouver une foule de cinglés débitant des laïus sur l’Insatiable Femme Tentatrice, mais je vais rester grand public avec Qaradawi, qui est suivi par un vaste auditoire sur les chaînes satellites et hors antenne. Bien qu’il affirme que la mutilation génitale des femmes (qu’il appelle la «circoncision», euphémisme courant qui tente de mettre cette pratique sur le même plan que la circoncision masculine) n’est pas «obligatoire», vous trouverez également cette inestimable observation dans un de ses livres: «Personnellement, je soutiens cette pratique vu les circonstances du monde moderne. Quiconque estime que la circoncision est le meilleur moyen de protéger ses filles devrait le faire», y a-t-il écrit, en ajoutant:
«L’opinion modérée favorise la pratique de la circoncision pour diminuer la tentation.»

Donc même chez les «modérés», les organes génitaux sont mutilés pour s’assurer que leur désir garde les lèvres cousues —cet hilarant jeu de mot est intentionnel bien sûr. Qaradawi a depuis émis une fatwa contre la mutilation génitale féminine, mais personne ne s’étonne que quand l’Egypte a interdit la pratique en 2008, certains législateurs des Frère musulmans se soient opposés à la loi. Et c’est toujours le cas —y compris une éminente députée, appelée Azza al-Garf.

Pourtant ce sont bien les hommes qui n’arrivent pas à se contrôler dans les rues, où, du Maroc au Yémen, le harcèlement sexuel est endémique, et c’est à cause des hommes que tant de femmes sont encouragées à se voiler. Au Caire, un wagon de métro est réservé aux femmes pour nous protéger des mains baladeuses et de pire encore; d’innombrables centres commerciaux saoudiens sont réservés aux familles, interdisant l’accès aux hommes seuls s’ils ne produisent pas la femme requise pour les accompagner.

Nous entendons souvent que les économies défaillantes du monde arabe empêchent de nombreux hommes de pouvoir se marier, et certains utilisent cet argument pour expliquer la hausse du niveau de harcèlement sexuel dans les rues. Un sondage de 2008 de l’Egyptian Center for Women’s Rights révèle que plus de 80% des Egyptiennes déclarent avoir subi un harcèlement sexuel et plus de 60% des hommes admettent le pratiquer. En revanche, rien sur la manière dont un mariage plus tardif peut affecter les femmes. Les femmes ont-elles des besoins sexuels ou non? Apparemment, le monde arabe n’en est qu’à ses balbutiements en termes de rudiments de biologie humaine.

La vénération d’un Dieu misogyne

C’est là qu’intervient l’appel à la prière et la sublimation par la religion que Rifaat introduit si brillamment dans son récit. Tout comme les religieux nommés par le régime bercent les pauvres avec des promesses de justice —et de vierges nubiles— dans l’au-delà au lieu de reconnaître la corruption et le népotisme du dictateur dans cette vie, de même les femmes sont réduites au silence par une association mortelle d’hommes qui les détestent tout en leur affirmant que Dieu est fermement de leur côté, à eux.

Je reviens à l’Arabie saoudite, et pas seulement parce quand j’ai rencontré ce pays à l’âge de 15 ans, le traumatisme m’a propulsée dans le féminisme —il n’y a pas d’autre moyen de le décrire— mais parce que le royaume assume ouvertement sa vénération d’un Dieu misogyne et qu’il n’a jamais à en payer les conséquences, grâce à son maudit double avantage d’avoir du pétrole et d’abriter les deux sites les plus sacrés de l’islam, la Mecque et Médine.

A l’époque —dans les années 1980 et 1990— comme aujourd’hui, les religieux qui passaient à la télévision saoudienne étaient obsédés par les femmes et leurs orifices, et surtout par ce qui en sortait. Je n’oublierai jamais la fois où j’ai entendu que si un bébé mâle vous urinait dessus, vous pouviez garder vos vêtements pour prier, alors que si c’était une fille, il fallait vous changer. Mais qu’est-ce qui pouvait bien vous rendre impur dans l’urine de fillette? m’étais-je demandé.
La haine des femmes.
Voulez-vous savoir à quel point l’Arabie saoudite déteste les femmes? Au point que 15 filles sont mortes dans l’incendie de leur école à la Mecque en 2002, quand la «police des mœurs» les a empêchées de fuir le bâtiment en feu —et empêché les pompiers de les secourir— parce qu’elles ne portaient pas les voiles et les manteaux obligatoires en public. Et il n’y a eu aucune conséquence. Personne n’a été jugé. Les parents ont été réduits au silence. L’unique concession faite à l’horreur par Abdallah, le prince royal de l’époque, a été de soustraire l’éducation des filles aux fanatiques salafistes qui ont néanmoins réussi à maintenir largement leur main de fer sur le système éducatif du royaume.

Haine en Arabie saoudite, haine en Tunisie, haine en Libye…

Il ne s’agit pas là d’un phénomène exclusivement saoudien, d’une curiosité odieuse dans ce désert riche et isolé. La haine islamiste des femmes se consume ardemment dans toute la région —aujourd’hui plus que jamais.

Au Koweït, où pendant des années les islamistes ont combattu le droit de vote des femmes, ceux-ci ont harcelé les quatre femmes qui avaient réussi à accéder au parlement, exigeant que les deux qui ne couvraient pas leurs cheveux portent des hijabs. Quand le parlement koweitien a été dissout en décembre dernier, un député islamiste a exigé que la nouvelle chambre —où ne siégeait plus la moindre femme— discute cette loi sur «la tenue décente.»

En Tunisie, longtemps considérée comme ce qui se rapprochait le plus d’un exemple de tolérance à suivre dans la région, les femmes ont retenu leur respiration à l’automne dernier quand le parti islamiste Ennahda a remporté la majorité des voix lors des élections de l’Assemblée constituante. Les dirigeants du parti se sont engagés à respecter le Code du statut personnel de 1956, qui déclare «le principe d’égalité entre hommes et femmes» en tant que citoyens et interdit la polygamie. Mais des enseignantes d’université et des étudiantes se sont plaintes depuis d’avoir subi des agressions et des intimidations de la part d’islamistes parce qu’elles ne portaient pas de hijabs, tandis que de nombreux activistes du droit des femmes se demandent comment des débats sur la loi islamiste vont réellement affecter la loi réelle sous laquelle elles devront vivre dans la Tunisie post-révolution.

En Libye, la première chose que le chef du gouvernement par intérim, Moustafa Abdel Jalil, promit de faire fut de lever les restrictions du tyran mort concernant la polygamie. Avant d’imaginer Mouammar al-Kadhafi comme un féministe, souvenez-vous que sous son règne, les filles et les femmes qui avaient survécu à des agressions sexuelles ou étaient soupçonnées de «crimes moraux» étaient jetées dans des «centres de réhabilitation sociale», des prisons en réalité, d’où elles ne pouvaient sortir tant qu’un homme n’acceptait pas de les épouser ou que leurs familles ne les reprenaient pas.

Et puis il y a l’Egypte, où moins d’un mois après le retrait du président Hosni Moubarak, la junte militaire qui le remplaçait, officiellement pour «protéger la révolution», nous a involontairement rappelé les deux révolutions dont nous, les femmes, avons besoin.

Même la voix est une tentation

Après avoir débarrassé la place Tahrir des manifestants, l’armée a arrêté des dizaines d’activistes, hommes et femmes. Les tyrans oppriment, battent et torturent tout le monde. Ça nous le savons. Mais ces officiers réservent les «tests de virginité» aux activistes femmes: un viol sous la forme d’un médecin qui insère ses doigts dans le vagin à la recherche de l’hymen (le médecin a été poursuivi et finalement acquitté en mars).

Quel espoir peut-il y avoir pour les femmes dans le nouveau parlement égyptien, dominé comme il l’est par des hommes bloqués au VIIe siècle? Un quart de ces sièges parlementaires sont désormais occupés par des salafistes, qui estiment que singer les us et coutumes de l’époque du prophète Mahomet est une prescription appropriée à la vie moderne. A l’automne dernier, en présentant des candidates aux élections [parce que la législation l’y obligeait], le parti salafiste égyptien Al-Nour a remplacé le visage de chaque femme par une fleur. Les femmes ne doivent être ni vues, ni entendues —même leur voix est une tentation— elles siègent donc au parlement égyptien, couvertes de noir des pieds à la tête et toujours absolument muettes.

Et nous sommes au beau milieu d’une révolution en Egypte! C’est une révolution au cours de laquelle des femmes sont mortes, ont été battues, mitraillées et agressées sexuellement en luttant aux côtés des hommes pour débarrasser notre pays de ce patriarche majuscule —Moubarak— et pourtant tant de patriarches minuscules nous oppriment encore.
Les Frères musulmans, avec presque la moitié de tous les sièges de notre nouveau parlement révolutionnaire, ne croient pas que les femmes (ou les chrétiens d’ailleurs) puissent être présidentes. Celle qui dirige le «comité des femmes» du parti politique des Frères musulmans a récemment déclaré que les femmes ne devraient ni défiler ni manifester car il est plus «digne» de laisser leurs maris et leurs frères le faire pour elles.

La haine des femmes va loin dans la société égyptienne. Celles d’entre nous qui ont défilé et manifesté ont dû négocier un champ de mines d’agressions sexuelles commises à la fois par le régime et ses laquais, et, malheureusement, parfois par ceux qui font la révolution à nos côtés.

Celui qui a décidé ainsi n’a jamais été une femme

Le jour de novembre où j’ai été victime d’une agression sexuelle dans la rue Mohamed Mahmoud près de la place Tahrir, par au moins quatre membres de la police anti-émeutes égyptienne, j’avais d’abord été pelotée par un homme sur la place même. Alors que nous dénonçons avec empressement les agressions commises par le régime, quand nous nous faisons violenter par des civils comme nous, nous imaginons immédiatement que ce sont des agents du régime ou des voyous car nous ne voulons pas ternir l’image de la révolution.

Quelles solutions?

D’abord, arrêtons de faire semblant. Reconnaissons la haine pour ce qu’elle est. Résistons au relativisme culturel et sachons que même dans des pays qui connaissent des révolutions et des soulèvements, les femmes resteront toujours la cinquième roue du carrosse. On vous dira —à vous, le monde extérieur— que c’est notre «culture» et notre «religion» de faire ceci ou cela aux femmes. Sachez bien que celui qui en a décidé ainsi n’a jamais été une femme. Les soulèvements arabes ont peut-être été déclenchés par un homme arabe —Mohamed Bouazizi, le vendeur des rues tunisiens qui s’est brûlé vif par désespoir— mais ils seront terminés par les femmes arabes.

N’attendons pas que nos Bouazizi meurent

Amina Filali —la jeune marocaine de 16 ans qui s’est empoisonnée après avoir été forcée à épouser son violeur, qui la battait— est notre Bouazizi. Salwa el-Husseini, la première femme égyptienne à s’ériger publiquement contre les «tests de virginité»; Samira Ibrahim, la première à être allée devant les tribunaux; et Rasha Abdel Rahman, qui a témoigné à ses côtés —elles sont nos Bouazizi. Il ne faut pas attendre qu’elles meurent pour le devenir. Manal al-Sharif, qui a passé neuf jours en prison pour avoir enfreint la loi de son pays interdisant aux femmes de conduire, est la Bouazizi d’Arabie saoudite. Elle est à elle seule une force révolutionnaire qui s’oppose à un océan de misogynie.

Nos révolutions politiques ne réussiront pas si elles ne sont pas accompagnées de révolutions de la pensée —des révolutions sociales, sexuelles et culturelles qui renverseront les Moubarak dans nos esprits autant que dans nos chambres à coucher.

«Vous savez pourquoi ils nous ont soumises à des tests de virginité?», m’a demandé Samira Ibrahim après que nous avons défilé des heures en l’honneur de la journée internationale de la femme au Caire le 8 mars.
«Ils veulent nous faire taire; ils veulent chasser les femmes pour qu’elles retournent à la maison. Mais nous ne bougerons pas.»

Nous ne nous réduisons pas à nos foulards et à nos hymens. Ecoutez celles d’entre nous qui se battent. Amplifiez les voix de la région et regardez de près la haine dans ses yeux. Il y eut un temps où être islamiste était la position politique la plus vulnérable en Égypte et en Tunisie. Sachez qu’aujourd’hui, ce pourrait bien être celle de la femme. Comme ça l’a toujours été.

Mona Eltahawy
(Traduit par Bérengère Viennot)

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L’AUTEUR
Mona Eltahawy est une éditorialiste égypto-américaine. En novembre 2011, la police égyptienne l’a frappée, lui cassant le bras gauche et la main droite, et l’a agressée sexuellement. Elle a été détenue par le ministère de l’Intérieur et les services de renseignement militaire pendant douze heures.
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D. Furtif
Administrateur
D. Furtif
10 mai 2012 8 h 52 min

Après avoir lu cette description minutieuse et incontestable, n’est-il pas temps de poser une question.
.
Quel est le nom du mal qui tourmente nos QUANTIQUES,pour refuser de voir ou se complaire dans le maintien des viols et violences faites aux femmes par la religion islamique.
N’y aurait-il pas dans ce qu’il proclament comme normal une grande part de ce qu’il adopteraient ou souhaiteraient adopter pour eux mêmes dans leur relations avec les femmes.Leurs blagues salaces et leurs ricanements nous montrent bien qu’ils en bavent d’envie.
Mettez les un peu en confiance , ils se lâcheront .
J’en ai connu des curieux qui ne pouvaient pas se retenir de nous raconter leurs histoires de bordel, et leurs fantasmes à la vue d’un femmes seule dans un café.Ça leur faisait , je ne sais quoi , mais ils ne pouvaient pas se passer de leurs prétendues évocations et conclusions savantes sur les femmes dans les cafés et les femmes en général.
.
Nous en avons lu , et nous en gardons le souvenir vif et précis, qui osent affirmer que le cri de révolte des femmes contre les tourments qui leur sont imposés, était ❓ inopportun.
Il est inopportun le cri de la fillette violée
Il est inopportun le combat de la femme islamique pour le respect de sa condition humaine.
Les racailles s’habillent de bienpensance et de paix sociale mais ça ne change rien ce sont des racailles
.
Nous le savons pour beaucoup ce n’est pas seulement de la haine qu’ils éprouvent pour les femmes mais une véritable terreur. La femme pourrait agir comme un révélateur de ce qu’ils sont vraiment.Des aspirants chefaillons de village terrorisés par la moindre contestation domestique.
Disons le mot nous en connaissons qui pérorent et jargonnent le « psykologik et le sociologik » et qui de la femme ne connaissent rien .Vous avez bien lu = RIEN. N’est-ce pas le lot de bien des curés et de bien des prétendus athées quantiques accommodateurs.

Léon
Léon
10 mai 2012 9 h 42 min

Personnellement ce genre de texte me met dans une rage folle. C’est vrai que le pouvoir sur les femmes est un invariant ethnologique et qu’il est partagé peu ou prou par toutes les civilisations. Mais justement, tout est dans le « peu ou prou », tout est dans la prise de conscience et le choix moral, philosophique, politique,de dépasser cette tendance. Mais pour cela il faut accepter de porter un jugement sur les « cultures » ou les « civilisations ». Y compris sur la sienne, car sinon on s’interdit le progrès pour soi-même. Et si on l’accepte pour soi, au nom de quoi on s’interdirait ce « droit d’inventaire » pour les autres ?
Et qu’on ne me dise pas que l’Islam n’y est pour rien au prétexte que cela existe aussi ailleurs. L’islam est au minimum complice. Au minimum.
Quant à ceux qui osent défendre, justifier, excuser, cautionner, tolérer, « comprendre », regarder ailleurs, je n’aurai pas de mots assez durs.
Quant elle dit « imaginez, c’est 1000 fois pire », ça veut dire quelque chose pour les femmes qui le subissent.

COLRE
COLRE
10 mai 2012 11 h 20 min

Ai-je besoin d’exprimer mon dégoût et ma rage à cette lecture ?!

J’ai tellement crié ma révolte ici et ailleurs devant cette infâme omnipotence masculine de l’islam, cet esclavagisme patriarcal et misogyne, cette oppression indigne niée par tous les gentils islamophiles de meeeeerde, qui en plus se permettent de nous donner des leçons de bienséance morale et politique ! on rêve… j’en perds mes mots…

Oui, Mona Eltahawy, trop tristement d’accord : le monde arabe hait les femmes

Merci de le dire, merci de témoigner, merci de nous montrer à tous et toutes l’exemple du courage, de l’héroïsme même, de la détermination politique, comme tant d’autres femmes issues de la culture islamique, qui sont aux premières loges du danger, de la discrimination, de la souffrance et de la révolte.

Mais qu’ils en prennent de la graine les imbéciles heureux, les relativistes bornés, les tolérants de l’abject, aussi malfaisants que les bourreaux eux-mêmes ! 👿

Causette
Causette
10 mai 2012 14 h 40 min
Reply to  COLRE

Moi ce qui me fout la rage c’est ça
Celle qui dirige le «comité des femmes» du parti politique des Frères musulmans a récemment déclaré que les femmes ne devraient ni défiler ni manifester car il est plus «digne» de laisser leurs maris et leurs frères le faire pour elles. – C’est désespérant!

Et il n’y a pas que le Ps qui caresse les barbes islamiques, la preuve.

Tous petits déjà. Les gamines de la famille sont priées de servir leurs frères. Elles se font engueuler deux fois plus que les garçons, même si elles n’ont rien fait.

Buster
Membre
Buster
10 mai 2012 14 h 38 min

Oui nous sommes expansionnistes ! Nous souhaitons que l’égalité homme femme conquière le monde.
Oui nous sommes colonisateurs ! Nous n’avons pas peur de dire que nos idées sont préférables à l’obscurantisme et qu’elles remplaceront avantageusement les vestiges des barbaries.
Oui nous sommes prosélytes ! Nous avons des « disciples » dans tous les pays qui adhèrent et militent pour que ces idées triomphent.
Oui nous sommes intransigeants ! Nous refusons les compromis et le relativisme.
Oui nous vaincrons ! Ailleurs comme ici nos idées s’imposeront, ce n’est qu’une question de temps.

Léon
Léon
10 mai 2012 18 h 09 min
Reply to  Buster

Euh, Buster… ? 😯

Buster
Membre
Buster
10 mai 2012 20 h 58 min
Reply to  Léon

😉
Sur une musique « martiale » (que je maitrise mal 🙁 ) j’essaye de retourner quelques valeurs jugées très négativement : Expansionnisme – colonisation – prosélytisme – intransigeance….. au service des idées d’égalité homme-femme.
Et dans ce cas (dans ce cas seulement) ces valeurs me semblent redevenir positives.

Marsupilami
Marsupilami
10 mai 2012 14 h 52 min

Monde Arabe, c’est trop restrictif. Ça concerne en fait tout le monde musulman. Voir par exemple le cas très original des bacha posh en Afganisthan. Du grand délire misogyne tribalo-islamique (vidéo visible jusqu’au 22 mai, dépêchez-vous de la regarder !).

Causette
Causette
10 mai 2012 17 h 59 min
Reply to  Marsupilami

Et ce film vous connaissez? Africa Paradis est un film sorti en 2007

Résumé ➡ Dans le futur – tandis que l’Europe a sombré dans la misère et le sous-développement, l’Afrique entre dans une ère de grande prospérité. Olivier informaticien sans boulot et Pauline, institutrice, elle aussi au chômage, vu leur situation déplorable en France décident de tenter leur chance en Afrique où ils immigrent clandestinement. À peine arrivés, ils sont arrêtés par la police des frontières et incarcérés dans une résidence de transit, en attendant d’être renvoyés en France. Olivier parvient seul à s’échapper. Il commence alors une vie de clandestin, jusqu’au jour où il récupère les papiers et endosse l’identité d’un blanc tué dans un accident de voiture. Entre-temps, Pauline accepte un poste de bonne dans une famille bourgeoise africaine.

Sylvestre Amoussou le réalisateur a déclaré:
« J’ai décidé que l’Afrique est devenu un continent riche et l’Europe est devenu totalement décadente. Donc l’immigration change de camp. Et c’est les blancs, les européens qui vont au Consulat des États-Unis d’Afrique pour demander un Visa pour se rendre en Afrique. Et évidemment… on leur refuse le visa et ils décident de partir clandestinement. Dans ce film, on voit enfin les européens vivre… en fait… un tout petit peu ce que peut vivre un immigré quand il vient en France. » (extrait) :mrgreen: L’Europe c’est l’enfer les gars n’y allez surtout pas!

Léon
Léon
10 mai 2012 18 h 12 min
Reply to  Marsupilami

« Monde musulman » aussi, c’est trop restrictif. L’auteure de cet article parle de ce qu’elle connaît bien.

Marsupilami
Marsupilami
10 mai 2012 18 h 44 min
Reply to  Léon

@ Léon

J’ai utilisé le terme « restrictif » parce que les Afghans sont des musulmans et pas des Arabes, et que la situation des femmes dans leur pays est effroyable en-dehors des milieux privilégiés de Kaboul, dont les jours de répit sont très comptés vu que les troupes occidentales ne vont pas tarder à se barrer de ce charmant pays.

Léon
Léon
10 mai 2012 20 h 25 min
Reply to  Marsupilami

J’avais compris, Marsu. Ce soir à « Envoyé spécial » un reportage sur l’excision en Indonésie. Je ne sais pas si j’aurai le courage de regarder…

Léon
Léon
10 mai 2012 20 h 35 min
Reply to  Léon

D’ailleurs, pour rester dans le domaine des frustrations sexuelles dans certaines cultures ( toutes respectables, bien sûr…), j’ai noté les propos d’un auteur Égyptien qui racontait à quel point le fait qu’en Egypte les femmes soient quasiment toutes excisées est une source de frustration … pour les hommes aussi, privés de la satisfaction de procurer des orgasmes à leurs partenaires et d’une sorte de preuve de « compétence virile ».
On a ici une démonstration supplémentaire que dans le domaine des rapports hommes/femmes, la domination n’est pas préjudiciable uniquement aux dominées.

iskender
iskender
10 mai 2012 18 h 16 min

il hait les femmes, et il aime les hommes , le monde arabe: quiconque s’y est un peu frotté, si je puis dire, sait que l’homophilie y règne; ce qui n’est pas un scandale en soi, si elle ne s’accompagnait pas de l’hypocrisie, de la honte, de la violence, de la misogynie…

Léon
Léon
10 mai 2012 18 h 47 min

C’est un point à noter effectivement. N’a-t-on pas, en fait, une société très répressive sur le plan sexuel mais tellement misogyne qu’elle favorise une homosexualité officiellement condamnée d’une manière violente?

Marsupilami
Marsupilami
10 mai 2012 18 h 58 min
Reply to  Léon

@ Léon

C’est exactement ça. En Inde, où le statut des femmes hindoues ne vaut pas mieux que celui des musulmanes, l’homosexualité masculine est honnie et violemment combattue et en même temps omniprésente (et très visible, j’ai pu m’en apercevoir à maintes reprises dans les espaces publics). Faute de grives, on mange des merles et il faut bien que coups de bites se passent. Idem dans les monastères chrétiens que j’ai beaucoup fréquentés à une époque, où les femmes étaient considérées comme des sacs à péchés charnels à l’exception de la vierge Marie, et où l’homosexualité chez les moines était courante et même pas toujours honteuse. Un vieux moine m’avait même confié sous le sceau du secret qu’il fallait être au minimum homophile pour être moine…

Léon
Léon
10 mai 2012 20 h 23 min

Heureusement qu’en plus de l’islamisme, on n’ait pas à se taper en France l’Hindouisme, autre truc délirant et moyenâgeux…

Léon
Léon
10 mai 2012 20 h 36 min

Heu, pas moyenâgeux, préhistorique…

D. Furtif
Administrateur
D. Furtif
10 mai 2012 20 h 39 min

Tout près de chez moi, vraiment tout près , on a ça , mais on rigole plus qu’on ne s’inquiète.
À Poitiers même c’est autre chose de beaucoup moins drôle

Causette
Causette
10 mai 2012 20 h 48 min

Là c’est bien l’islamisme, y’a pas a tortiller. Ce soir sur Fr2

«Excision en Indonésie» : Le poids d’une tradition. Un reportage d’Alexandra Deniau et Eric Beurot. En Indonésie, le plus grand pays musulman du monde, l’excision est une tradition très ancrée. Dès le plus jeune âge, les petites filles subissent une mutilation de leur clitoris. Dans certaines provinces Indonésiennes, la quasi-totalité des petites filles sont excisées.

Causette
Causette
14 mai 2012 17 h 47 min

IRAN
➡ Période médiévale et islamisation
La condition féminine en Iran change de façon importante au cours de la période médiévale. À partir de la conquête islamique de la Perse, le rôle social des femmes se modifie. Toute participation à la vie publique ou à l’exercice du pouvoir leur est interdite. Des droits concernant la sphère privée sont également supprimés, et des lois s’inspirant de l’islam avantagent désormais les hommes. La polygamie est facilitée et le port du hijab devient la règle.
➡ 1979-1989 : Recul de la condition des femmes
L’islamisation de la société a commencé en soumettant le statut des femmes à la chari’a. Les femmes seront écartées de toute les hautes fonctions dans le secteur public et devront se résigner à porter le Hijab, l’uniforme islamique ou le Chador. Encore aujourd’hui, selon Salaam Iran, le site officiel du gouvernement iranien, « le Hijab protège la femme contre toute tentative de viol ou de violence » (sic!).

Je signale ces deux pages wikipedia

Rapport entre hommes et femmes dans l’islam
Nous pouvons dire que dans le cas où l’on insisterait quand même sur le sens propre, réel, du verbe frapper qui figure dans le verset, à savoir qu’il s’agirait d’une punition corporelle infligée à la femme, il s’imposerait alors de dire que l’emploi de l’impératif dans la phrase « corrigez-la ! », n’implique pas une valeur obligatoire en cas d’insoumission de l’épouse. Il est plutôt une façon d’orienter l’époux au cas où d’autres méthodes se seraient avérées vaines. Mais il est évident en même temps que l’ambiance suggérée par les autres éléments de ce débat incite plutôt à suivre la voie de ‘‘l’embargo’’ économique, si l’on peut s’exprimer ainsi. La correction serait alors une mesure à envisager comme une méthode visant à ramener la stabilité et le retour à la normale dans l’attitude de l’épouse.

Rapport entre hommes et femmes dans l’islam/Neutralité: Discussion
Bon, j’aurais même eut tendance à parler de recyclage car cet article est malheureusement un tract… proislamisme