Le chant liturgique russe orthodoxe présente quelque particularités d’un point de vue musical.
- D’abord, seules les voix sont autorisées dans les églises, à l’exclusion de tout autre instrument.
- La musique, ensuite, y est strictement subordonnée au texte : d’une part les syllabes sont prononcées simultanément par tous les choristes afin que les mots restent compréhensibles; d’autre part, les mouvements musicaux doivent en principe souligner, accompagner les phrases, leur sens. Pas question, par exemple d’introduire un silence à un endroit qui aurait une logique musicale mais n’en aurait pas du point de vue du texte, ne correspondrait pas à une ponctuation.
- Enfin, théoriquement, l’oeuvre doit être assez facile pour pouvoir être chantée par des choeurs non-professionnels et, même, éventuellement les fidèles. C’est la règle la moins bien respectée, on s’en doute, même si à l’évidence les musiciens ont fait des efforts. Le chant doit reposer, en principe, sur des harmonies simples, les plus « naturelles » possibles et éviter les dissonances avant-gardistes.
L’exercice est donc très contraint et la plupart des grands compositeurs russes de musique classique s’y sont essayés, comme une sorte de défi à relever : Tchaïkovsky, Rmisky-Korsakov, Rachmaninoff, Stravinsky, mais également d’autres musiciens qui doivent leur renommée essentiellement à leurs compositions liturgiques comme Kedroff, Tchesnokov, Gretchaninov ou Kostalsky.
Certains ont composé des offices entiers, d’autres se sont limités à une seule prière. Celle qui a eu le plus de succès est le « Notre Père », prière centrale et connue de tous les fidèles, qui a aussi la particularité d’avoir un texte de la bonne longueur, ni trop court comme le « Je vous salue Marie » , ni trop long comme le « Credo ».
Voici donc sur le même texte, en slavon ( la langue liturgique des orthodoxes slaves — qui serait un proto-bulgare), le Notre Père de six compositeurs russes. Le plus étonnant, sans doute, est celui de Stravinsky, obligé par les règles de cet exercice à un classicisme harmonique qu’on ne lui connaît pas d’habitude… Et j’ai eu du mal à trouver une version à peu près correcte de celui de Rimsky-Korsakov, pourtant le plus connu, le plus interprété et le plus adapté en toutes les langues liturgiques.
Stravinsky |
Tchaïkovski |
Kedrov |
Rachmaninov | Tchesnokov |
Rimsky-Korsakov |
Devinez quel est mon préféré ?
Je trouve celle de Tchaikovski le tourmenté , concertante voire mondaine, en revanche celle de Stravinski paradoxalement plus habitée et émouvante.
Je ne vois vraiment pas celle que tu peux préférer.
Rachmaninoffcourse….
ah là bin ça je suis fort surpris. 😆 😆
Tu aurais au moins pu nous laisser le dire Léon 😆
Merci Léon, je viens de passer un super moment.
Sinon, je n’y connais rien, alors mes impressions brutes de candide :
Rachma : y a pas photo, la plus intéressante avec ses ruptures d’intensité, ses montées et ses descentes. C’est profond, insondable, une musique qui vient de loin, très métaphysique (je vais dire une horreur : je verrai bien cette musique accompagner un documentaire d’astronomie ou un film de SF…)
Tchaïkovski : ma préférée ensuite, je crois, dans l’émotion, et c’est la plus « religieuse » en sonorités, mais sans doute assez « facile », on dirait des chants de Noël ! ce doit être ma nostalgie…
Stravinsky : trop « travaillé », manque de simplicité et de ferveur, ennuyeuse pour moi.
Tchesnokov : plus opératique, avec des « solos » qui émergent du choeur, non ? je n’ai pas accroché.
Rimsky : voix d’enfants prédominantes, cela me barbe un peu, mais ça c’est moi.
Kedrov : un peu mou du genou et raplapla…
En même temps, celui de Rachmaninoff est le plus difficile, le moins chantable par des amateurs ou les fidèles…
Un peu de swing avec une voix méconnue Hélène Humes avec Wynton Kelly, joe Gordon, etc..