Les Julia,Claudiennes. Ah la famille ! (1)

Ça commence par un énorme loupé, un ratage énorme, scandaleux. Les Claude ( Claudii) sont une famille arrivée à Rome au moment des synœcismes à la fin du VIème siècle . En plus des membres de la famille ils comptaient 5000 membres rien que dans leur clientèle .

D’abord on a les 3 frères :
Un Claudius consul en – 54, un autre préteur en  56  qui s’activent dans les rangs des Optimates.

Le troisième, lui  change de nom pour raison de plan de carrière. Son avenir étant un peu bouché du coté des Optimates, ou simplement pour pourrir la vie de Cicéron,  il se fait appeler Clodius qui « sonne » plus peuple et se faire élire comme tribun de la plèbe en +58. Grand chef de la racaille il se rangera du coté de Caesar et sera tué pour cela par Milon. L’histoire officielle qui ne recule jamais devant l’infamie ne manquera pas de le taxer d’incestes en rafale avec ses trois sœurs.
Trois sœurs qui, bien que légères au plan de la morale ne manquent pas de s’inscrire dans la politique familiale.  Elles se retrouvent mariées

  • -Clodia major, selon  Cicéron  folle de son frère parait-il, se serait un peu débarrassée de son mari  le consul Q. Cæcilius Metellus
  • – Les deux autres sœurs de Clodius, Clodia minor, mariée à Lucullus le grand général , Clodia Tertia, mariée à Marcius Rex, avaient aussi joué à Hera/Junon avec Zeus / Jupiter/Clodius. Quand on a une famille issue du panthéon, n’en adopte-t-on pas les usages ? D’autant que tout le monde romain vit une fascination/répulsion  pour les pratiques des Lagides , eux-mêmes prétendant poursuivre les usages des Pharaons. Paul Emile et ses pareils n’ont pas ramené que de l’or des conquêtes de Macédoine et d’Asie. Ils ont ramené aussi des goûts  et des modes. Chaque époque a sa branchitude . Caton peut s’époumoner à condamner les dépravations grecques, comme il ne crache pas sur l’or tout le monde sait la mesure de sa posture morale.

Pour compléter le tableau il faut revenir à la veuve de Clodius _ Fulvie_.

Vous la connaissez c’est celle qui provoquera une émeute pour venger la mort de son mari assassiné dans la rue par Milon, un copain de Cicéron. Cette émeute entrainera l’incendie de  la Curie, et en fin de la chaine des  causes/conséquences facilitera la mort de Jules quelques mois plus tard au pied de la statue de Pompée, loin là bas au nord, loin du Forum,  sur le Champ de Mars. Comme elle était un peu la maitresse d’Antoine elle l’épouse et lui donne une fille Clodia Pulchra. On  retrouvera la petite Pulchra , un temps,  épouse d’Auguste

Bingo Jackpot…Les Claude ont gagné ! Bin non
Pompée est un Claude, et Crassus est  mort avant d’avoir changé de femme, Tertulla… .Pauv’ Crassus !

Le mariage romain

L’âge légal du mariage est de 12 ans pour les filles, 14 ans pour les garçons. Mais ceux-ci se marient en général vers 30 ans. A l’époque républicaine, on ne se marie pas par amour mais pour avoir des enfants et accomplir ainsi un devoir religieux (continuation du culte des ancêtres) et civique( honorer perpétuer la cité). Les romains de cette époque condamnent toute manifestation publique de tendresse entre époux. La première valeur morale est la fertilité/fécondité. Pour la transcendance évanescente et chaste on attendra les chrétiens.
À l’origine, la cérémonie, liée aux fondements sacrés de la cité, sa batterie de droits et devoirs, est réservée aux  seuls les patriciens. Les jeunes s’épousent mais aussi leurs familles , mais encore leurs ancêtres. Seuls sont concernés les patriciens, seuls ils  ont le droit de se marier légalement. Les plébéiens n’obtiennent ce droit qu’en 450 avant JC, conjointement au droit d’épouser des patriciennes. Les étrangers et les esclaves en seront toujours privés.
Les mariages les plus anciens étaient des mariages cum manu qui faisaient passer la jeune épousée de l’autorité du père à celle du mari.
Il y avait trois formes possibles de mariage :

  • La confarreatio, cérémonie la plus ancienne, à caractère religieux ,qui rendait le mariage indissoluble. Après la prise des auspices, les deux nouveaux époux offraient à Jupiter un gâteau de froment ou farreum qu’ils se partageaient ensuite devant l’autel domestique. A la fin de la République ce mariage n’est plus en usage que dans les familles de flamines (prêtres).
  • La coemptio consistait en un achat symbolique de la jeune fille par le fiancé. Le père accomplissait l’acte rituel de vente en prononçant la phrase « par l’airain (pièce de monnaie) et la balance, je transfère la propriété ».
  • Le mariage per usum ou de fait, qui légitimait une cohabitation d’une année.

Vers la fin du Vème siècle av JC le mode général de mariage pour toutes les classes devient le sine manu . Le père conserve un droit sur sa fille même après le mariage. Des gratifications aux prêtres proportionnelles à la fortune des familles   permettaient de transformer officiellement en sine manu tous les mariages et ainsi de remettre les deux époux sur le marché des célibataires. À la fin de la République le coemptio et le per usum ont pratiquement disparu au profit du nuptiae fondé théoriquement sur le consentement des jeunes époux
Sous l’Empire , le fiancé passe l’anneau et offre des cadeaux pour les fiançailles . La cérémonie a lieu  chez la mariée  La veille du mariage la fiancée parait en vêtement blanc puis manteau safran et voile orange le jour des noces, une matrone officie et joint devant témoins les mains des époux en signe d’engagement. Festin, musique, chants, blagues salaces telles sont les noces depuis 2500 ans. L’apparition de l’étoile Vesper déclenche un simulacre de rapt… Formules et gestes propitiatoires contre le mauvais œil. Nous devons beaucoup aux romains.

On ne s’attardera pas trop à ces attendus légalistes.

Pour les femmes qui nous occupent dans ce Nartic, c’est bien le diable si elles n’ont pas un flamine (prêtre) voire un pontife dans la famille. Sinon, un bélier, un bœuf et quelques pièces d’or et le tour est joué. La dissolution est prononcée. Mariages et répudiations à répétition  sont le tout venant de la vie matrimoniale des  grandes familles à la fin de la République. Nous verrons que cette tendance s’aggravera sous l’Empire.
Pour ce qui est de la surface des choses, de qui monte sur le podium, ce ne fut pas les Claude, ce fut les Jules, une famille de deuxième ordre

♫ ♪ ..La maman de Caesar elle est bien gentille e…e ..eu ♫♫ ♪

Réglons vite un problème, dans la famille les garçons s’appellent tous Caius Julius Caesar. Le nôtre, celui que nous connaissons depuis toujours, c’est numéro IV. C’est loin d’être un âne.
N’oublions pas ! Nous sommes en pleine guerre civile. Les camps s’affrontent urbi et orbi. Les cadavres  trainent dans les rues, ils flottent sur le Tibre. La clique au pouvoir prononce des proscriptions qui autorisent à liquider les proscrits et à se saisir de leurs biens dans des conditions de violence inouïes. Tous ces gens parlent au nom de la République et de la grandeur de Rome, des Dieux et des ancêtres. La chasse est  ouverte et les dépouilles sont à qui  est assez adroit pour s’en emparer. L’honneur de la famille et les Dieux tutélaires l’exigent ; le sang versé n’a-t-il pas toujours été  la justification ultime de tous les vols et de tous les crimes.
Au milieu de cette cohue sanguinaire une femme décide de ne pas se remarier sitôt son mari mort. Curieux. Plus curieux, elle semble ne vouloir se consacrer qu’à son unique rôle de mère. Elle inaugure un genre assez rare : la mère chef de famille.
Aurélia Cotta, de la famille des Aurélii,  a 20 ans en juillet – 100, à la naissance du petit Caius Julius César IV . Numéro 3 lui a déjà fait deux filles. Les histoires de césariennes de Pline l’Ancien :  c’est du flanc. Quand son mari  César III partisan de Marius ( Populares) meurt en attachant ses chaussures, en – 85,  assez paradoxalement elle ne se remarie pas. Pourtant le remariage est une pratique sociale ultra majoritaire dans la Rome de la fin de la République. Nolens volens elle reste aux cotés de son fils. Ses deux filles ainées  sont mariées depuis longtemps.
Aurélia est unanimement reconnue come l’archétype de la matrone vertueuse, (selon Tacite). Ne sur joue-t-elle pas un peu beaucoup son personnage ? César lui-même n’en a-t-il pas rajouté sur sa mère ? Tacite lui-même ? Va savoir. Toujours est-il qu’Aurélia est là, toujours là, et qu’elle se mêle. Elle se mêle de tout
Elle marie son fils à Cornélia la fille de Cinna l’homme de Marius. Ils lui donneront une petite fille Julia Césaris. Alors que Pompée vient de  renvoyer sa femme Mucia pour adultère avec notre  César IV ,  il va épouser la fille de son rival, comme ça , en guise de réconciliation.
♫ ♪Au pays de Candy  ♪ ♫
Cornélia, morte à 25 /26 ans, cède la place à Pompéia Sulla la petite fille de Sylla. Mariage sans histoire, mariage politique. Sauf …Sauf que, Maman Aurélia vient cafter à son fils une histoire que Caius Julius Caesar IV va saisir au bond.
Une Noceur coureur de jupons « Clodius Pulcher » , le Clodius Pulcher, a réussi à pénétrer la demeure des César . Autrement dit le domicile sacré et tabou du Grand Pontife Jules Caesar quatrième du nom.. Le scandale est public, on est à la Regia sur le forum près du temple des Vestales. La cérémonie strictement réservée aux femmes se déroule un soir où César, lui-même, est tenu à l’extérieur. Clodius s’introduit dans la maison sacrée, déguisé en femme mais maquillant mal sa voix, la belle doche le reconnaît et hurle à l’attentat à la pudeur. Pompéia et ses copines un peu navrées de n’avoir pas pu profiter de la compagnie du « beau » Clodius auraient pu tenir leur langue et garder le secret. Mais… On constate qu’Aurélia (sur les conseils de son fils ???) n’est pas la copine de sa bru.
Il y a donc scandale sur le forum. « La femme de César ne doit même pas être suspectée » Pompéia est répudiée.

À bientôt 40 ans César n’a toujours pas de fils.

Vite divorce et vite  remariage de César en 59 avec  Calpurnia Pisonis . Le couple restera sans enfant jusqu’en  mars 44. Elle ne se remariera pas.
Julia, la fille de Cornélia, seule enfant de César mariée à Pompée meurt en couche.
Caius Julius César IV vainqueur des Gaules et maitre du Monde  n’a pas de successeur.
Sa sœur Julia   a une fille  Atia qui, elle, en a un. Caius Octavius Thurinus  (Thurii une victoire de son père) Il est donc le petit neveu de Caius Julius César IV.


On récapitule:

Une mère : Aurélia Cotta

Trois femmes

  • Cornélia  morte à 23 ans et une fille morte à 19 ans , toutes les deux en couche.
  • Pompéia et un scandale politico religieux
  • Calpurnia – sa veuve.

Une nièce Atia Balba et son fils Octave, le futur Auguste.

La liaison avec Cléopâtre n’a jamais été officielle et le petit Caesarion  jamais reconnu

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Lapa
Administrateur
Lapa
25 janvier 2012 12 h 47 min

toujours très bien raconté! par contre y’a pas un problème de date au début? entre -54 et +56 ça fait beaucoup pour trois frères non?

Léon
Léon
25 janvier 2012 13 h 25 min

On finira incollables sur l’Histoire romaine…

ranta
ranta
25 janvier 2012 18 h 20 min

Encore Furtif, encore !

Léon
Léon
25 janvier 2012 19 h 59 min

Je réclame des explications sur la fonction que je trouve très étrange et originale de tribun de la plèbe!

Causette
Causette
26 janvier 2012 21 h 09 min

Bonsoir

des personnages de l’Histoire très intéressants. Aurélia Cotta la belle-doch’ veille de près les fréquentations de sa belle-fille, Pompeia Sulla, et découvre Clodius qui s’est introduit chez elle pour retrouver Pompeia lors d’une célébration des mystères de la Bonne Déesse. aïe aïe aïe!
Aussi curieuses sont leurs croyances, cette Bona Dea/Damia/Déméter venue de Grèce.

Un moment en lisant cette page d’histoire j’ai pensé à la pyramide: oratores/clergé, bellatores/noblesse/armée, laboratores/peuples/ceux qui triment 80%.