Logement social et mixité : « l’émulsion fusion » par les nuls

20081012 Toits d'HLM parisiens avec panneaux solaires (2)

Faute de pouvoir réquisitionner des terrains dans le centre de Paris pour mettre en pratique sa conception de la mixité sociale, le Maire de Paris réquisitionne son propre parc de logements situé en bordure des boulevards des maréchaux.

Selon les arrondissements, ce bâti en brique rouge qui borde le tracé du tramway abrite des catégories sociales très distinctes selon la géographie des lieux.

A l’Est, entre la Porte de la Chapelle et la Porte de Vincennes, aux ouvriers d’hier se sont substitués les immigrés pauvres, souvent des bénéficiaires de minimas sociaux, et les smicards. Peu à peu, les commerces en bas d’immeuble sont rachetés par les immigrés eux-mêmes, qui y recréent ce qu’ils ont laissé derrière eux en partant pour une France idéalisée.

L’Ouest fut longtemps réservé aux privilégiés des classes moyennes, fonctionnaires, serviteurs zélés du RPR, et quelques heureux bénéficiaires du 1% logement.

A l’époque du Grand Jacques, tout nouveau locataire recevait une missive signée de sa main,  disant tout son plaisir de vous compter dorénavant… parmi ses plus fidèles soutiens.

Dès son arrivée Place de l’Hôtel de Ville, Bertand Delanoë déclarait – à juste titre – vouloir  rompre avec la politique des petites combines de son prédécesseur, en installant dès les premiers jours de son mandat un Monsieur Propre, chargé de surveiller les attributions.  Les idéologues du PS poussèrent d’entrée à faire de la mixité sociale un cheval de bataille politique, pour plus d’équité et surtout, pour remédier au risque de constitution de ghettos et, plus récemment, pour endiguer la communautarisation galopante.

Or, réaliser la mixité sociale à Paris comme ailleurs est un casse-tête, sinon une chimère, d’autant que nul n’est capable de dire à quelle échelle s’apprécie cette fameuse mixité sociale. S’agit-il du bâtiment A, de l’immeuble dans son entier, du quartier ou de la Ville de Paris dans son ensemble ? Quelle composition socio-professionnelle, ethnique, veut-on faire cohabiter ? La question des quotas est-elle tabou ? et, au fond, sait-on véritablement ou l’on va ?

Sous les lambris dorés de l’Hôtel de Ville, on caresse le rêve de faire de Paris un laboratoire de la mixité sociale par émulsion-fusion des groupes sociaux.

Réintroduire les classes moyennes dans les HLM situés à l’Est, c’est prendre le risque de les chasser vers la banlieue Ouest. Alors, que faire, sinon l’inverse ?

C’est du moins la solution qui semble avoir été choisie par nos édiles.

Construire de nouveaux logements et mixer la population. Plus facile à dire qu’à faire. Comment rentabiliser le bâti, qui va payer ? le locataire, les services sociaux ? Le coût sera-t-il supportable pour la collectivité ?

La solution de facilité est donc de reprendre la main dans le bâti géré par les bailleurs sociaux.

Au final, beaucoup de questions restant sans réponse et de vrais problèmes dans le monde réel.

Sous le manteau, Véronique (*), chargée de mission au Logement Français avoue son désarroi. « Nous gérons un important parc immobilier qui se dégrade plus rapidement qu’hier. Nous devrions bichonner les classes moyennes qui, elles, sont solvables et qui permettent d’entretenir le bâti. Le problème, c’est que nous ne contrôlons plus rien. On nous demande  d’accueillir en priorité des familles issues le plus souvent de l’immigration, bénéficiaires de minimas sociaux. A force d’expérience, je suis convaincu qu’il y a bien un seuil à ne pas franchir si l’on ne veut pas pousser les classes moyennes vers la sortie. Pour moi, il faudrait des quotas, mais c’est un sujet tabou. Je pense que l’on va dans le mur »

Marie (*), ancienne locataire à la RIVP  dans un de ces immeubles en brique rouge près de la Porte d’Orléans s’est résolue à partir en 2009. «  J’ai acheté à Sceaux un logement trois fois plus petit que celui que j’occupais. Ce n’était plus possible de rester. De toute façon, on nous a fait comprendre que la politique du logement changeait. Soit, nous acceptions un gros supplément de loyer, soit nous devions quitter les lieux. Je n’ai pas eu de mal à me décider. Mes nouveaux voisins, une famille nombreuse d’origine africaine, s’étaient installés à l’étage au dessus. Des gens charmants au demeurant mais bruyants, et qui lessivaient à grande eau leur parquet en chêne, avec pour conséquence des dégâts des eaux à répétition. Et puis surtout, ce sont ces gamins insolents qui dégradent les ascenseurs et viennent pisser sur votre paillasson en représailles si vous leur faites le moindre reproche. Quoi que l’on dise, nous sommes taxés de racisme. A la longue, c’est épuisant ».

Même refrain, chez Anselme (*), locataire depuis 20 ans dans un logement RIVP de la Porte de Saint-Mandé. « Je suis cadre, africain d’origine, et je suis ici logé depuis plus de 20 ans grâce au 1% logement. Jusqu’ici, nous ne rencontrions que très peu de problèmes de voisinage. Depuis peu, de nouveaux locataires remplacent les anciens, en majorité des familles nombreuses, d’origine étrangère. Récemment, je me suis colleté avec une locataire iranienne qui encombre la cage d’escalier avec ses poussettes et qui « fleurit son balcon » avec des baskets fumantes. On ne peut rien leur demander, ni discuter sans que le ton monte. C’est à croire qu’ils n’ont aucun devoir, que des droits. Pas facile, même pour moi, de monter au créneau. Pour toute réponse, j’ai eu droit récemment à un « toi, t’es un traitre à ta race »… »

Du côté des bailleurs, un brin désabusés, c’est silence radio ou presque… « nous n’avons plus la main, pour les plaintes, voyez avec les services de la Ville ».
Bref, une « émulsion fusion » qui a tout de la nitroglycérine et qui laisse augurer un bilan à l’identique de ce que nous connaissons déjà avec nos cités « radieuses » du 9-3.

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Léon
Léon
7 novembre 2011 15 h 21 min

Article hélas qui recoupe des informations que j’ai par ailleurs;

La question du voisinage avec des familles nombreuses est complexe.
D’abord, du point de vue de l’espace, elles sont généralement mal adaptées aux appartements urbains, surtout si, de surcroît, il s’agit de familles pauvres obligées de s’entasser dans des HLM trop petits qui souffrent toujours d’un défaut énorme d’isolation sonore.
Ensuite, c’est une donnée anthropologique connue : plus il y a d’enfants plus la valeur que les parents accordent à chacun d’eux individuellement diminue. Ceci tient d’une part à la limitation des ressources matérielles qui doivent être partagées, mais aussi à l’attention, la surveillance dont ils peuvent faire l’objet.

Dans les milieux ruraux, notamment africains, les enfants sont élevés dans des familles très élargies et chacun d’entre eux trouve un peu spontanément son référent adulte, même si ce n’est pas son père ou sa mère biologique. Ceci manque cruellement dans les familles nombreuses immigrées installées en France, surtout si, par dessus le marché, le mari fiche le camp du domicile lorsqu’il se rend compte que ça devient trop compliqué.

Alors on a des mères exténuées qui n’en peuvent plus et n’arrivent plus à assumer des enfants qui deviennent totalement insupportables, irresponsables et qui n’ont plus la moindre notion de la nuisance à autrui. En plus, il est impossible effectivement de dire quoi que ce soit car la fatigue et la culpabilité sont telles que l’agressivité est omniprésente.
Et évidemment si vous engueulez un petit con parce qu’il met sa chaîne à hurler du rap à 3h du matin, vous êtes un raciste…

D. Furtif
Administrateur
D. Furtif
7 novembre 2011 16 h 24 min

Pour avoir conservé de la famille et des amis de Porte d’Asnières à Porte de Bagnolet à Paris intra muros, 50 ans plus tard les années 60 apparaissent comme un age d’or.
La dégradation générale est inversement proportionnelle à l’efficacité des services d’enlèvement et de fourrière au pied des immeubles .Le Parc public n’est objet de sollicitude qu’au plan de la passation des marchés,(chauffage et ascenseurs) En revanche la recette des loyers.??? 😕

Causette
Causette
7 novembre 2011 17 h 14 min

Dès son arrivée Place de l’Hôtel de Ville, Bertand Delanoë déclarait – à juste titre – vouloir rompre avec la politique des petites combines de son prédécesseur, en installant dès les premiers jours de son mandat un Monsieur Propre, chargé de surveiller les attributions. RATÉ! être adhérent-e au parti qui gère l’arrondissement ça peut aider, ça marche encore.

pour les plaintes, voyez avec les services de la Ville
et les services de la ville de répondre: voyez votre bailleur
on tourne en rond, plus personne n’est responsable de quoi que ce soit.

J’ai des amis qui habitent dans une cité en banlieue proche de la porte d’Orléans. Ils évitent le plus possible de faire venir leurs copains chez eux. Ils préfèrent garder pour eux le plaisir de voir passé sous ses fenêtres toutes sortes de détritus que les voisins du dessus balancent par leurs fenêtres.

La seule mixité que j’ai pu rencontre dans ma vie, c’est au bistrot! :mrgreen: hélàs à Paris les plus intéressants ferment les uns après les autres.

Léon
Léon
7 novembre 2011 17 h 57 min

Cette histoire de balancer les détritus par la fenêtre, la première fois que j’en ai entendu parler, c’est dans les années 90. C’était quelque chose d’absolument inconcevable auparavant. A ce que j’entends, c’est devenu une habitude dans beaucoup de cités. Plein de raisons à cela : quelquefois les ascenseurs sont en panne et/ou on a la flemme de descendre 6 étages. Quelque fois les mômes à qui l’on confie souvent cette corvée ont peur du local à poubelles pour des raisons diverses. Mais on ne m’ôtera pas de l’idée qu’il y a aussi un je m’enfoutisme absolu des autres, conjugué à un certain relativisme de la propreté et de l’hygiène…

Causette
Causette
7 novembre 2011 20 h 46 min
Reply to  yohan

Je connais quelqu’un qui travaille pour un bailleur de hlm. Faut voir dans quel état, parfois, les locataires laissent l’appartement en partant. J’ai eu l’occasion d’en voir un (4 pièces avec balcon) une semaine après le départ d’une famille. Quel état! inimaginable, le parquet foutu, les sanitaires tout à refaire, baignoire cassée, wc pas racontable, les murs en lambeau. Total: pratiquement une année de loyer non payée + rénovation de l’appartement. Bonjour la note!
(j’étais sidérée, car à ce moment-là j’en étais à 9 ans d’attente d’un logement)

yohan
yohan
10 novembre 2011 15 h 48 min

Comment déloger notre CHE à nous qui fait de la résistance ?. J’ai bien ma petite idée. Bizarre qu’à la Mairie de Paris, ils n’aient pas la même que moi. Pour tester le CHE, je propose donc qu’on « l’encadre » avec quelques familles nombreuses issues de l’immigration; Pas de raison qu’il ne soit pas loti à la même enseigne que les autres. De plus, logiquement, il devrait en être « ravi » :mrgreen: