Les orchidées d’Europe, fragiles merveilles

Les orchidées de nos pays, souvent bien plus discrètes que celles des tropiques, sont peu connues alors qu’elles affichent des fleurs magnifiques, de formes et de couleurs remarquables  afin d’attirer des insectes pollinisateurs.
Elles n’ont pourtant rien à leur envier en matière de beauté ; je vais en donner un petit aperçu.
Il existe en France quelque 150 espèces différentes d’orchidées, qui croissent dans des environnements très différents. Certains de ceux-ci sont souvent menacés, pour diverses raisons, et les plantes associées en voie de raréfaction, quand ce n’est pas de disparition comme celles des tourbières et marais, que l’homme s’attache à faire disparaître.

Orchis provincialis et Epipactis helleborine

Certaines orchidées se rencontrent dans les sous-bois ou à leur lisière.

C’est le cas de l’orchis provençal (Orchis provincialis), méridional peu fréquent qui se trouve dans le tiers sud-est et en Corse. Les orchis ont une inflorescence en épi souvent assez serré.

C’est aussi l’habitat de l’épipactis à larges feuilles (Epipactis helleborine), qui abonde un peu partout en France. Les épipactis arborent des fleurs plus espacées qui affectent un peu la forme d’une étoile.

Un genre particulièrement intéressant est celui des ophrys (du grec signifiant sourcil, tant le pétale principal, appelé labelle, est souvent poilu). Ces petites plantes, parfois très discrètes, ont un petit nombre de fleurs assez lâches et souvent splendides. Elles poussent en général dans des lieux herbeux, souvent sur des pelouses sèches menacées d’embroussaillement par manque de fauche et de pâture. Regardez-les de près, car souvent chaque fleur ne mesure en hauteur que 3 à 5 cm…

Ophrys litigiosa et Ophrys insectifera

L’ophrys litigieux (Ophrys litigiosa), est très précoce et s’épanouit parfois dès le mois de mars.

L’ophrys mouche (Ophrys insectifera) imite étonnamment bien un insecte, jusqu’aux antennes.

Les deux sont assez fréquents dans toute la France en terrain calcaire, comme tous les ophrys. Aussi les régions cristallines (Massif Central, Bretagne) n’ont pas le plaisir de les héberger. Dans des régions peu propices, ils se cantonnent parfois au bord des routes, profitant du calcaire apporté par les remblais et les graviers de la chaussée.

L’ophrys abeille (Ophrys apifera), commun jusque… dans mon jardin, présente la particularité de s’autoféconder systématiquement, ce qui entraîne une absence quasi-totale d’hybridation.

La photo en tête de l’article montre les sacs de pollen, appelés pollinies, descendant pour aller féconder l’ovaire, dont le stigmate se trouve au-dessus de la zone orangée.

Ophrys apifera var. bicolor et Ophrys insectifera

Sa variété l’ophrys abeille bicolore (Ophrys apifera var. bicolor), rare, présente un labelle divisé en deux zones unies.

L’ophrys bourdon (Ophrys fuciflora), fréquent dans la moitié est de la France mais absent dans le midi, possède un labelle très large et richement coloré. Ses motifs, parfois très complexes, varient beaucoup et comportent souvent un petit cercle plus ou moins dessiné.

Il s’hybride facilement avec d’autres espèces d’ophrys. Ce genre, comme d’autres genres d’orchidées, comporte de nombreux hybrides, qui mêlent des caractères des deux parents.

Ophrys splendida et Ophrys bertolonii

L’ophrys splendide (Ophrys exaltata subsp. splendida) est peu fréquent et cantonné à la Provence méditerranéenne.

L’ophrys de Bertoloni (Ophrys bertolonii) se trouve dans la même région et est aussi disséminé.

Le sud de la France est plus riche que les autres régions pour la variété des espèces, en constituant la limite nord des plantes méditerranéennes. Les pays du sud, Espagne, Italie, Maghreb, sont pourvus d’une variété d’espèces souvent très grande et dont la floraison débute parfois en janvier…

Ophrys scolopax et Ophrys bertolonii subsp. saratoi

L’ophrys bécasse (Ophrys scolopax) est assez familier dans tout le sud du pays.

L’ophrys de Sarato (Ophrys bertolonii subsp. saratoi) n’est pas très fréquent; sous-espèce de l’ophrys de Bertoloni, il croît de la Provence littorale au Vercors.

La classification est assez délicate pour certaines espèces, comme celles du groupe bertolonii; certains botanistes préfèrent distinguer de nombreuses espèces, alors que d’autres sont partisans d’une moindre différenciation. Le tout est compliqué maintenant par l’analyse génétique qui provoque des reclassements par rapport aux classifications traditionnelles.

Cephalanthera rubra et Cypripedium calceolus

Dans d’autres genres, la céphalanthère rouge (Cephalanthera rubra), jamais bien courante, est une de nos plus belles orchidées ; elle affectionne les bois clairs.

Le sabot de Vénus (Cypripedium calceolus), la plus grande plante de la famille sous nos climats, rare et heureusement protégée, est la récompense de tous les orchidophiles !

Son labelle en forme d’outre attire les insectes  par son parfum sucré; pour en sortir, il n’existe qu’un chemin, qui les oblige à se frotter au pollen qu’ils apporteront à d’autres plantes.

Pour ceux qui veulent approfondir le sujet, voici quelques pistes :

    – un excellent livre magnifiquement illustré de photos remarquables, « Les Orchidées sauvages de France » par Rémy Souche. Collection Grandeur Nature des Créations du Pélican / Éditions Vilo, août 2007. 340 pages, 1220 photographies. ISBN 2 7191 0642 9.

– un très bon guide pratique  pour les orchidées méditerranéennes, « Orchidées de Genova à Barcelona » par Rémy Souche. Editions Sococor, 2008.  224 pages. ISBN 978 2 918075 01 1.

Je reparlerai dans un prochain article de Rémy Souche, homme étonnant s’il en est. Je recommande chaudement ses livres, qui peuvent être commandés sur le site http://www.ophryshybrides.com/index.php.

    – la Société Française d’Orchidophilie, 17 quai de la Seine, 75019 Paris, regroupe les amateurs ; elle publie le bulletin « l’Orchidophile ». Site : http://www.sfo-asso.com/

– un bon guide généraliste, « Les Orchidées de France, Belgique et Luxembourg », de Bournérias M., Prat D. et al., Biotope,  2005. 504 pages. ISBN 2 914817 11 8.

Philippe Renève

Les photos sont de l’auteur.
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31 Commentaires
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Monique Peyron
Monique Peyron
27 décembre 2010 11 h 21 min

Passionnée par la faune et la flore, en Ardèche, pays oh! combien calcaire, il m’est arrivé de rencontrer au bord des chemins des petites fleurs roses ressemblant à des gueules de loup avec ce qu’on nomme un sabot de vénus. Peut-être sont-ce des orchidées que je n’ai pas su reconnaître ? Merci pour vos photos et pour les livres. Au printemps, je vais me pencher sur le sujet et si je peux, j’apporterai ma contribution.

Monique Peyron
Monique Peyron
27 décembre 2010 12 h 13 min

Après vos indications, il doit s’agir de muflier, ce pourquoi je pensais à la gueule de loup. A + pour mes recherches.

Monique Peyron
Monique Peyron
27 décembre 2010 12 h 22 min
Reply to  Ph. Renève

Les enfants s’amusent à les faire parler 😀

Monique Peyron
Monique Peyron
27 décembre 2010 12 h 32 min
Reply to  Ph. Renève

Je me revendique de faire encore partie du CP de l’année prochaine 🙂

Monique Peyron
Monique Peyron
27 décembre 2010 12 h 33 min

😳 je parle de l’école bien sûr, pas d’amalgame !

Léon
Léon
27 décembre 2010 12 h 54 min

Depuis que je connais Renève, je fais attention désormais. Et c’est vrai que dans le sud on en voit souvent. C’est assez exaltant de tomber sur ces plantes si extravagantes et souvent très belles.

Monique Peyron
Monique Peyron
27 décembre 2010 13 h 06 min
Reply to  Léon

Bonjour Léon, je vais faire plus attention dorénavant. Il est dommage de passer auprès de telles merveilles, par ignorance.

Monique Peyron
Monique Peyron
27 décembre 2010 13 h 26 min
Reply to  Ph. Renève

mais j’en ai dans mon terrain, que j’arrache systématiquement, quelle est bête cette momo 😯

Léon
Léon
27 décembre 2010 14 h 33 min
Reply to  Ph. Renève

Renève, je te prie de surveiller tes propos et d’éviter des liens vers des photos cochonnes, il y a des enfants qui nous lisent !

Buster
Membre
Buster
27 décembre 2010 14 h 47 min
Reply to  Ph. Renève

Des genres d’idiots utiles ?

De là à penser que les insectes islamo-gauchistes favorisent la pollinisation en milieu occidental, y a pas loin.

Causette
Causette
27 décembre 2010 13 h 40 min

Bonjour Philippe, bonjour Monique, quelle jolie page sur nos discrètes 😀 au printemps je vais aller en Provence, je prêterai une attention particulière à ces petites fleurs.

Enfant, j’ai cru cueillir un ophrys bourdon, bin non, c’était un vrai bourdon, aïe :mrgreen:

Monique Peyron
Monique Peyron
27 décembre 2010 14 h 00 min
Reply to  Causette

Bonjour Causette, bonjour maxim.

Ces fleurs sont superbes. J’apprend, j’apprend, une journée de notre vie n’est jamais perdue, la preuve.

maxim
maxim
27 décembre 2010 13 h 44 min

on en a aussi dans une réserve marécageuse de la forêt de Fontainebleau à Episy ,en principe personne n’y touche,c’est vrai que c’est superbe .

D. Furtif
Administrateur
D. Furtif
27 décembre 2010 15 h 49 min

Chez moi celles là pullulent et, comme elles se méfient de ma tondeuse elles vont se planter dans les pieds de lavande et, depuis l’an dernier, dans les groseilles et les cassis

Fantomette
Membre
Fantomette
28 décembre 2010 13 h 22 min

Elles sont magnifiques ces fleurs… je ne sais pas si nous en avons en Tourain emais je me ferai vigilante désormais!

PS : une question bête : la vanille est-elle bien une orchidée?