Certaines orchidées se rencontrent dans les sous-bois ou à leur lisière.
C’est le cas de l’orchis provençal (Orchis provincialis), méridional peu fréquent qui se trouve dans le tiers sud-est et en Corse. Les orchis ont une inflorescence en épi souvent assez serré.
C’est aussi l’habitat de l’épipactis à larges feuilles (Epipactis helleborine), qui abonde un peu partout en France. Les épipactis arborent des fleurs plus espacées qui affectent un peu la forme d’une étoile.
Un genre particulièrement intéressant est celui des ophrys (du grec signifiant sourcil, tant le pétale principal, appelé labelle, est souvent poilu). Ces petites plantes, parfois très discrètes, ont un petit nombre de fleurs assez lâches et souvent splendides. Elles poussent en général dans des lieux herbeux, souvent sur des pelouses sèches menacées d’embroussaillement par manque de fauche et de pâture. Regardez-les de près, car souvent chaque fleur ne mesure en hauteur que 3 à 5 cm…
L’ophrys litigieux (Ophrys litigiosa), est très précoce et s’épanouit parfois dès le mois de mars.
L’ophrys mouche (Ophrys insectifera) imite étonnamment bien un insecte, jusqu’aux antennes.
Les deux sont assez fréquents dans toute la France en terrain calcaire, comme tous les ophrys. Aussi les régions cristallines (Massif Central, Bretagne) n’ont pas le plaisir de les héberger. Dans des régions peu propices, ils se cantonnent parfois au bord des routes, profitant du calcaire apporté par les remblais et les graviers de la chaussée.
L’ophrys abeille (Ophrys apifera), commun jusque… dans mon jardin, présente la particularité de s’autoféconder systématiquement, ce qui entraîne une absence quasi-totale d’hybridation.
La photo en tête de l’article montre les sacs de pollen, appelés pollinies, descendant pour aller féconder l’ovaire, dont le stigmate se trouve au-dessus de la zone orangée.
Sa variété l’ophrys abeille bicolore (Ophrys apifera var. bicolor), rare, présente un labelle divisé en deux zones unies.
L’ophrys bourdon (Ophrys fuciflora), fréquent dans la moitié est de la France mais absent dans le midi, possède un labelle très large et richement coloré. Ses motifs, parfois très complexes, varient beaucoup et comportent souvent un petit cercle plus ou moins dessiné.
Il s’hybride facilement avec d’autres espèces d’ophrys. Ce genre, comme d’autres genres d’orchidées, comporte de nombreux hybrides, qui mêlent des caractères des deux parents.
L’ophrys splendide (Ophrys exaltata subsp. splendida) est peu fréquent et cantonné à la Provence méditerranéenne.
L’ophrys de Bertoloni (Ophrys bertolonii) se trouve dans la même région et est aussi disséminé.
Le sud de la France est plus riche que les autres régions pour la variété des espèces, en constituant la limite nord des plantes méditerranéennes. Les pays du sud, Espagne, Italie, Maghreb, sont pourvus d’une variété d’espèces souvent très grande et dont la floraison débute parfois en janvier…
L’ophrys bécasse (Ophrys scolopax) est assez familier dans tout le sud du pays.
L’ophrys de Sarato (Ophrys bertolonii subsp. saratoi) n’est pas très fréquent; sous-espèce de l’ophrys de Bertoloni, il croît de la Provence littorale au Vercors.
La classification est assez délicate pour certaines espèces, comme celles du groupe bertolonii; certains botanistes préfèrent distinguer de nombreuses espèces, alors que d’autres sont partisans d’une moindre différenciation. Le tout est compliqué maintenant par l’analyse génétique qui provoque des reclassements par rapport aux classifications traditionnelles.
Dans d’autres genres, la céphalanthère rouge (Cephalanthera rubra), jamais bien courante, est une de nos plus belles orchidées ; elle affectionne les bois clairs.
Le sabot de Vénus (Cypripedium calceolus), la plus grande plante de la famille sous nos climats, rare et heureusement protégée, est la récompense de tous les orchidophiles !
Son labelle en forme d’outre attire les insectes par son parfum sucré; pour en sortir, il n’existe qu’un chemin, qui les oblige à se frotter au pollen qu’ils apporteront à d’autres plantes.
Pour ceux qui veulent approfondir le sujet, voici quelques pistes :
– un excellent livre magnifiquement illustré de photos remarquables, « Les Orchidées sauvages de France » par Rémy Souche. Collection Grandeur Nature des Créations du Pélican / Éditions Vilo, août 2007. 340 pages, 1220 photographies. ISBN 2 7191 0642 9.
– un très bon guide pratique pour les orchidées méditerranéennes, « Orchidées de Genova à Barcelona » par Rémy Souche. Editions Sococor, 2008. 224 pages. ISBN 978 2 918075 01 1.
Je reparlerai dans un prochain article de Rémy Souche, homme étonnant s’il en est. Je recommande chaudement ses livres, qui peuvent être commandés sur le site http://www.ophryshybrides.com/index.php.
– la Société Française d’Orchidophilie, 17 quai de la Seine, 75019 Paris, regroupe les amateurs ; elle publie le bulletin « l’Orchidophile ». Site : http://www.sfo-asso.com/
– un bon guide généraliste, « Les Orchidées de France, Belgique et Luxembourg », de Bournérias M., Prat D. et al., Biotope, 2005. 504 pages. ISBN 2 914817 11 8.
Philippe Renève
Bonjour à tous
Encore une photo, d’un ophrys très rare cette fois: l’ophrys bombyx (Ophrys bombyliflora) trouvé dans l’Aude grâce à la gentillesse de Rémy Souche.
Passionnée par la faune et la flore, en Ardèche, pays oh! combien calcaire, il m’est arrivé de rencontrer au bord des chemins des petites fleurs roses ressemblant à des gueules de loup avec ce qu’on nomme un sabot de vénus. Peut-être sont-ce des orchidées que je n’ai pas su reconnaître ? Merci pour vos photos et pour les livres. Au printemps, je vais me pencher sur le sujet et si je peux, j’apporterai ma contribution.
Bonjour Monique
Les sabots de Vénus sont toujours jaunes et bruns, et poussent dans des forêts claires. Ce que vous évoquez est plus certainement des plantes du genre du grand muflier (Antirrhinum majus) ou de certains de ses petits camarades comme le muflier des champs ou le genre linaire. Ces fleurs ont deux lèvres fermées qui évoquent une gueule (d’où le nom muflier) ou un sabot.
Mais si vous vous intéressez à la flore, vous devez connaître quelques orchidées communes et bien visibles comme l’orchis pourpre (Orchis purpurea), l’orchis mâle (Orchis mascula) ou l’orchis militaire (Orchis militaris). Si dans vos futures promenades vous rencontrez des plantes que vous pensez être des orchidées, envoyez-moi donc des photos; je me ferai un plaisir de vous renseigner.
Il faut toujours considérer la structure d’une fleur d’orchidée, très particulière avec trois pétales dont un remarquable (le labelle) et trois sépales. Aucune autre plante n’a ce schéma de fleur.
Après vos indications, il doit s’agir de muflier, ce pourquoi je pensais à la gueule de loup. A + pour mes recherches.
C’est ça. Un petit truc: on peut en pressant doucement de chaque côté à la base des lèvres faire s’ouvrir la « gueule » de façon amusante.
Les enfants s’amusent à les faire parler 😀
Voilà. Mais il faut être enfant pour les entendre… 😉
Je me revendique de faire encore partie du CP de l’année prochaine 🙂
😳 je parle de l’école bien sûr, pas d’amalgame !
Oh oui, on a tous une dent contre l’amalgame ! 😉
Depuis que je connais Renève, je fais attention désormais. Et c’est vrai que dans le sud on en voit souvent. C’est assez exaltant de tomber sur ces plantes si extravagantes et souvent très belles.
Bonjour Léon, je vais faire plus attention dorénavant. Il est dommage de passer auprès de telles merveilles, par ignorance.
Il y a des orchidées amusantes à regarder de près: voici un des orchis homme pendu (Orchis anthropophora) de mon jardin !
mais j’en ai dans mon terrain, que j’arrache systématiquement, quelle est bête cette momo 😯
Il n’est jamais trop tard pour apprendre ! Dès l’automne, la plupart des orchidées défleuries refont une rosette de feuilles au ras du sol; épargnez-les, surveillez l’endroit et vous verrez les fleurs entre mars et juin selon les espèces.
La rosette de l’orchis homme pendu comporte des feuilles qui semblent fripées, gaufrées comme on le voit sur cette photo; c’est assez caractéristique.
Les fleurs de certaines orchidées, notamment les ophrys chez nous, imitent des insectes – jusqu’à l’odeur simulée par des phéromones – pour les attirer; prenant la fleur pour un congénère du sexe opposé, l’insecte va se livrer à ce que les naturalistes appellent une pseudocopulation, qui va l’amener à se frotter aux sacs de pollen (les pollinies) qui vont se coller à lui. A la visite d’une autre plante, c’est elle qui sera fécondée…
De très bonnes photos de pseudocopulations ici.
Renève, je te prie de surveiller tes propos et d’éviter des liens vers des photos cochonnes, il y a des enfants qui nous lisent !
Pseudocopulations: ce sont des attrape-insectes couillons !
Tu sais, maintenant les enfants au maillot savent que les bébés naissent plus dans le frottement de couenne que dans les choux.
Alors, si je puis dire, voir des photos d’insectes s’agitant sur des fleurs, ça leur en touche une sans faire bouger l’autre ! 😀
Des genres d’idiots utiles ?
De là à penser que les insectes islamo-gauchistes favorisent la pollinisation en milieu occidental, y a pas loin.
Bonjour Philippe, bonjour Monique, quelle jolie page sur nos discrètes 😀 au printemps je vais aller en Provence, je prêterai une attention particulière à ces petites fleurs.
Enfant, j’ai cru cueillir un ophrys bourdon, bin non, c’était un vrai bourdon, aïe
Bonjour Causette, bonjour maxim.
Ces fleurs sont superbes. J’apprend, j’apprend, une journée de notre vie n’est jamais perdue, la preuve.
Bonjour Causette
Pas de problème avec les orchidées: elles ne piquent que… la curiosité ! 😆
on en a aussi dans une réserve marécageuse de la forêt de Fontainebleau à Episy ,en principe personne n’y touche,c’est vrai que c’est superbe .
Les milieux humides ont des espèces particulières, notamment du genre Dactylorhiza ou le joli épipactis des marais; lorsqu’ils sont acides comme les tourbières, ils abritent des plantes rares comme le liparis de Loesel ou l’hammarbie des marais.
D’une manière générale, à moins de bien connaître, il vaut mieux s’abstenir de cueillir des orchidées. Si certaines espèces sont très communes, beaucoup d’autres sont plus ou moins menacées par disparition des biotopes (pâtures abandonnées qui s’embroussaillent, marais asséchés, urbanisation).
Il faut bien voir que la rareté d’une plante est le fait qu’on ne la voit pas souvent. Mais là où on la trouve, elle peut être abondante. C’est le cas des sabots de Vénus, qui sont parfois nombreux, mais dans des endroits très disséminés. Même le rarissime ophrys bombyx photographié ici poussait à cet endroit par dizaines; mais seulement dans quelques lieux en France… Donc l’abondance d’une plante à un endroit donné ne signifie pas forcément qu’elle est commune; c’est bien sûr valable pour toute la flore.
Chez moi celles là pullulent et, comme elles se méfient de ma tondeuse elles vont se planter dans les pieds de lavande et, depuis l’an dernier, dans les groseilles et les cassis
Il n’y a que le Furtif pour parfumer sa gelée de groseille et son cassis à l’orchis bouc (Himantoglossum hircinum)…
Elles sont magnifiques ces fleurs… je ne sais pas si nous en avons en Tourain emais je me ferai vigilante désormais!
PS : une question bête : la vanille est-elle bien une orchidée?
Je suis terriblement désolé de vous contredire mais la question n’est pas bête du tout ! 😉
En effet, la vanille est une « gousse » d’une orchidée tropicale.
Il est à noter que plusieurs espèces de chez nous sentent délicieusement bon… la vanille. C’est surtout le cas des nigritelles, plantes de montagne souvent appelées orchis vanille. Elles embaument littéralement.
On peut citer aussi l’orchis brûlé, dont le parfum est très voisin.
De nombreuses orchidées d’Europe ont un parfum plus ou moins prononcé mais toujours agréable, qui va de la vanille à l’iris (barlie de Robert) en passant par le miel anisé (orchis musc) ou le lis (platanthère à deux feuilles).
Le sabot de Vénus, lui, attire les insectes par une odeur charmante entre abricot et banane.
Et je confirme que vous avez bien sûr des orchidées en Touraine. Il doit y avoir une cinquantaine d’espèces en Indre et Loire.
Nous en reparlerons à la belle saison, mais je suis à votre disposition pour identifier des plantes sur des photos que vous pouvez envoyer sur ou sur un site de partage.
Les orchidées bien sûr et surtout, mais aussi d’autres plantes, dans la mesure de mes connaissances d’amateur.
Ceux qui auront trouvé des orchidées intéressantes seront glorieusement mis en vedettes et auront le bonheur de faire pâlir de jalousie ceux qui ne seront pas dans les premiers !